Île Chypre : Il se passe quelque chose en Méditerranée

09:578/08/2025, الجمعة
Ersin Çelik

Il faut être conscient que les équilibres mondiaux changent rapidement. Les États souverains, à l’exception d’Israël, ont commencé à comprendre que l’ordre actuel fonctionne à leur détriment. Alors que l’on entend les douleurs de l’enfantement d’un nouvel ordre mondial, il devient également clair que nous allons voir se multiplier les initiatives visant à mettre fin aux incertitudes anciennes. La fin de l’occupation du Karabagh, l’engagement de l’Occident à reconnaître l’État palestinien et la prise

Il faut être conscient que les équilibres mondiaux changent rapidement. Les États souverains, à l’exception d’Israël, ont commencé à comprendre que l’ordre actuel fonctionne à leur détriment. Alors que l’on entend les douleurs de l’enfantement d’un nouvel ordre mondial, il devient également clair que nous allons voir se multiplier les initiatives visant à mettre fin aux incertitudes anciennes.


La fin de l’occupation du Karabagh, l’engagement de l’Occident à reconnaître l’État palestinien et la prise de distance politique de ces pays vis-à-vis d’Israël, les soulèvements populaires pour Gaza, la mobilisation pour établir un État stable en Syrie après la révolution, l’acceptation par La Haye de la plainte pour génocide déposée par l’Afrique du Sud contre Israël, la recherche de stabilité politique et économique par des États africains ayant brisé les chaînes coloniales, la reconnaissance par l’Italie du Gouvernement d’unité nationale libyen soutenu par Türkiye après les changements d’équilibre en Libye, et enfin, l’aveu par l’organisation terroriste PKK, sous l’influence des États-Unis et d’Israël, qu’elle n’a pas d’autre choix que de déposer les armes… Tout cela fait partie des nombreux événements historiques auxquels nous avons assisté en quelques années.


Au centre de cette nouvelle configuration politique se trouve Türkiye. Les tables où l’on met fin aux crises et aux guerres se dressent dans notre pays. Les démarches diplomatiques prennent forme sur notre sol.


Dans la construction du nouvel ordre mondial, il est manifeste que l’on cherche aussi à lever certaines anciennes incertitudes. L’une d’elles est la reconnaissance de la
"République Turque de Chypre du Nord"
(RTCN) comme État.

On le sait, la RTCN n’est reconnue que par Türkiye. Les autres pays, ainsi que les organisations internationales, au premier rang desquelles les Nations unies, ne considèrent pas la RTCN comme un État. En diplomatie, on parle ici de
"situation de facto"
. En contrepartie, Türkiye ne reconnaît pas la partie grecque – bien qu’elle soit membre de l’Union européenne – comme un
"État".
Cette position intransigeante de Türkiye a permis à la partie turque de rester jusqu’à présent dans l’équation. L’intégration de la RTCN en tant qu’observateur à l’Organisation des États turciques en 2022 a marqué un tournant.

Par ailleurs, la tentative d’Israël d’occuper Gaza dans son intégralité a montré combien les terres chypriotes turques de l’île de Chypre sont vitales pour l’équilibre en Méditerranée.

D’autre part, l’idée que la crise et l’incertitude vieilles d’un demi-siècle sur l’île prendront fin avec une
"solution à deux États dans laquelle la RTCN est reconnue politiquement"
commence à être acceptée sur la scène internationale grâce à la politique menée par Türkiye.

Ainsi, alors que les équilibres mondiaux se redessinent, l’intégration de la RTCN dans la politique mondiale deviendra inévitable. Un développement qui donne un signe clair des futures manœuvres stratégiques de Türkiye s’est produit, de surcroît, sous l’égide de la RTCN, à Londres.


Je parle de la campagne
"Ada Kıbrıs"
(Île Chypre) lancée pour faire de la RTCN une marque reconnue dans le tourisme international. J’en ai d’ailleurs écrit la dépêche dans notre journal avant-hier : la nouvelle compagnie aérienne turque AJet, sous l’égide de Turkish Airlines, a inauguré une ligne directe aller-retour entre Londres et l’aéroport d’Ercan, en République Turque de Chypre du Nord.

L’impact commercial de cette initiative, qui devrait doubler, voire tripler, les chiffres du tourisme de la RTCN, est considérable, mais sa portée politique est inestimable. L’atmosphère lors de la présentation, organisée au De Vere Grand Connaught, haut lieu d’événements à Londres, allait dans ce sens. Dans les discours du président du conseil d’administration de THY, Ahmet Bolat, et du Premier ministre de la RTCN, Ünal Üstel, j’ai senti cette excitation : la
"situation de facto"
de la RTCN évoluait.

Oui, il s’agit d’un investissement touristique. De plus, c’est une grande commodité pour les quatre cent mille Chypriotes turcs vivant au Royaume-Uni. Ces vols mettront fin à l’obligation pour les voyageurs venant de l’étranger (hors Türkiye) d’atterrir dans la partie grecque pour rejoindre la RTCN, tout en constituant une manœuvre politique stratégique.


Le lancement depuis le Royaume-Uni de cette ligne, qui fera passer d’un coup les chiffres du tourisme de la RTCN de quatre à six millions de visiteurs, est un autre signe du nouveau contexte politique. Cette initiative menée par Turkish Airlines renforcera rapidement la reconnaissance sociale de la RTCN, étape préalable à sa reconnaissance par les États, et contribuera à sa légitimité.


Il faut aussi souligner la signification diplomatique du fait que la ligne commence au Royaume-Uni. Ce pays est l’un des trois garants de l’île de Chypre, avec Türkiye et la Grèce. Il devrait donc rester neutre et ouvrir la voie à une solution.


Cependant, le Royaume-Uni, garant à Chypre, n’a jusqu’à présent pas assumé ses responsabilités. Lors des massacres sanglants qui ont commencé en 1963 comme après l’intervention turque de 1974, les Britanniques sont restés
"spectateurs"
. Leur silence a contribué à ce que les conditions se retournent contre les Chypriotes turcs et en faveur des Chypriotes grecs. Ainsi, les vols
"Ada Kıbrıs"
au départ de Londres doivent être interprétés comme un signe que les Britanniques adopteront désormais une position favorable à la solution.

Le lien entre la reconnaissance de la RTCN comme
"État"
et l’ouverture de vols directs par une compagnie aérienne apparaîtra clairement dans un avenir proche. Lorsque les reconnaissances officielles et juridiques commenceront, le rôle de Turkish Airlines, marque mondiale de Türkiye, dans ce processus sera également au centre des discussions.
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