Crédit Photo : SAID KHATIB / AFP
Des hommes écoutent un récepteur radio portable dans une école gérée par l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 14 novembre 2023
Mahmoud Al Daoudi n'aurait jamais imaginé que les postes de radio qui prenaient la poussière dans sa boutique se vendraient à ce rythme, mais dans la bande de Gaza en guerre, ils sont devenus un rare canal d'information pour la population.
Si les coupures de courant faisaient partie du quotidien des 2,4 millions de Palestiniens de Gaza, elles ont évolué en black-out depuis qu'Israël a coupé l'approvisionnement en électricité et en carburant.
Impossible de brancher télévisions et ordinateurs, de recharger des téléphones ou de surfer sur internet, à moins de disposer de générateurs ou de panneaux solaires, un luxe que peu de Gazaouis peuvent s'offrir dans la bande de terre bombardée sans relâche par l'armée israélienne.
Pour suivre les nouvelles, reste la radio alimentée par piles. Mahmoud Al Daoudi, 33 ans raconte
Nous avions un stock plein, mais il est complètement vide depuis la première semaine de la guerre.
"La radio est le seul moyen de savoir ce qu'il se passe du fait des coupures d'internet et des communications"
et
"les piles durent longtemps",
vante-t-il dans sa boutique de Rafah, à l'extrémité sud du territoire.
Avant la guerre, qui a fait plus de 19.400 morts à Gaza selon le gouvernement du Hamas, un poste de radio coûtait environ 25 shekels (six euros), mais depuis, le prix est monté à 60 shekels (15 euros). De plus il ajoute:
Même les radios que l'on a vendues défectueuses et qui nous ont été retournées, on les a revendues.
Puis, quand les radios ont disparu des rayons, les clients ont demandé de vieux téléphones qui permettent de capter la radio et disposent d'une petite lampe de poche intégrée, vitale lorsque la nuit tombe.
"Et maintenant, nous manquons de téléphones!,"
dit Mahmoud Al Daoudi à l'AFP.
Et impossible de commander de nouveaux appareils, alors que l'aide humanitaire est acheminée au compte-gouttes dans le territoire.
"Les gens veulent suivre les nouvelles, savoir où ont lieu les bombardements (israéliens), s'enquérir du sort de leurs familles,"
explique Hussein Abou Hashem, qui lui non plus n'a plus de radios à vendre dans son magasin.
D'après l'ONU, 1,9 million de Palestiniens sont déplacés depuis le début de la guerre, soit 85% de la population. Ils vivent pour beaucoup dans le sud du territoire, massés dans des camps de fortune où ils manquent de tout.
"Je ne sais pas ce qu'il se passe autour de nous, où sont les frappes, quelles maisons sont visées, qui est vivant, qui sont les martyrs,"
énumère Oum Ibrahim, dans la ville de méridionale de Khan Younès:
Nous désirons recevoir des nouvelles de n'importe où à Gaza.
"Quand je n'ai plus de batterie, je marche dans le camp et je tends l'oreille pour entendre les radios des autres",
dit-il.
Des stations comme la BBC en arabe et Al-Jazeera ont lancé des fréquences spéciales à destination des déplacés pour les tenir au courant des dernières actualités.
Mohammed Hassouna, 75 ans, parle hébreu et capte les radios israéliennes:
"Ca permet d'avoir les nouvelles du côté israélien"
et
"j'informe mes enfants et mes voisins".
Devant sa tente, Salah Zorob, 37 ans, passe son temps à changer de stations de radio sur son téléphone.
"Le monde avance avec les hautes technologies et nous, à Gaza, nous régressons,"
déplore-t-il:
"On va nous ramener à l'âge de pierre."
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