France: associatifs musulmans et imams craignent d'avoir à payer le prix de leur soutien à la cause Palestinienne

18:3411/12/2023, lundi
MAJ: 11/12/2023, lundi
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"La paix pour les enfants" peut-on lire sur une pancarte d'une enfant en soutien à la Palestine.
Crédit Photo : BERTRAND GUAY / AFP
"La paix pour les enfants" peut-on lire sur une pancarte d'une enfant en soutien à la Palestine.

La guerre menée par Israël sur la Bande de Gaza a fait naître, depuis le 7 octobre, de vives crispations identitaires en France, où les uns et les autres sont sommés par une certaine caste politico-médiatique, de se positionner en condamnant le Hamas et affichant un franc soutien à Israël et à son prétendu "droit de se défendre".

La cause Palestinienne, naturellement chère aux musulmans du monde entier, est ainsi devenue l'un des marqueurs permettant de définir ses soutiens comme de potentiels ennemis de l'intérieur.


Les injonctions à se désolidariser des actions du Hamas, conjuguées à une diabolisation des pro-Palestiniens, mènent à de nombreuses craintes dans les rangs associatifs musulmans, et parmi les responsables religieux.


Les imams, qui sont en première ligne, éprouvent parfois les plus grandes difficultés à aborder le sujet et à trouver un juste équilibre entre appeler à la mobilisation des musulmans, et éviter les discours politiques, prohibés par la loi française dans les lieux de culte.

Plusieurs d'entre eux se sont confiés à Anadolu, refusant néanmoins que leur identité soit mentionnée pour échapper à d'éventuelles pressions.


Le premier, qui officie du côté de Nice, assure
"être contraint de prendre des pincettes pour échapper à des accusations délirantes qui voudraient faire de (lui) un antisémite dans la mesure où (il) rejette la guerre menée par Israël en Palestine".

S'il se joint aux manifestations à chaque fois qu'il le peut, le responsable religieux reconnaît craindre
"d'avoir à subir les conséquences de potentiels prêches portés sur la Palestine ou d'appels à se mobiliser".

"En vérité, je n'ai pas peur pour ma petite personne, parce que ce serait égoïste et vraiment lâche, mais je ne veux surtout pas faire peser de problèmes sur les associations ou les mosquées avec lesquelles j'ai pu travailler"
, explique l'imam.

Un autre imam, qui a notamment dirigé les prières d'une mosquée du bassin cannois, indique avoir "
abordé le sujet avec ses élèves lors de cours à huis-clos pour qu'ils prennent conscience de l'importance de se bouger pour les victimes palestiniennes bombardées de jour comme de nuit".

Et de poursuivre:
"Il faut être conscient que toutes les accusations peuvent désormais nous tomber sur la tête d'autant plus que le Hamas étant considéré par la France comme terroriste, il faut choisir les mots qu'on utilise".

Et ce sentiment est également partagé par des associatifs musulmans, pour qui la question palestinienne suscite quelques appréhension.


On se doit d'être courageux.

"J'ai été interpellé par de nombreux jeunes qui me demandaient de me positionner publiquement et j'ai trouvé ça louable et rassurant qu'ils soient conscients de l'importance de la lutte pour la Palestine".

"Et, donc, j'ai décidé de ne pas me mettre, mais je sais que je vais être en difficulté au moment de renouveler ma carte de séjour"
, souffle le quinquagénaire.

Selon lui, la loi séparatisme "
est venue mettre une grosse pression sur les associations" qui peuvent "être dissoutes avec des motifs politiques, sans procédure pénale ni condamnation"
, ce qui fait qu'il ne
"faut surtout pas donner le bâton pour se faire battre et rester irréprochables".

Un autre acteur, très actif dans le tissu associatif et ancien militant du Parti socialiste abonde dans le même sens.


On veut nous forcer à voir le conflit sous un prisme bien particulier, et donc à se mettre du côté d'Israël sinon on est criminalisés.

"Mais, en fait, ce que personne ne veut relever, c'est qu'il s'agit d'une guerre coloniale qui ne date pas du 7 octobre"
, déclare le fonctionnaire sous couvert d'anonymat.

En réalité, l'inquiétude face à d'éventuelles positions politiques sur la question, inquiète jusque dans les rangs du CFCM (Conseil français du culte musulman), qui a publié, dès le 12 octobre dernier, un communiqué appelant "
les responsables des mosquées et les imams à redoubler de vigilance".

"Tout développement autour du conflit israélo-palestinien et toute tentative de mettre en exergue les responsabilités des uns et des autres, outre qu'ils n'ont pas leur place dans un moment solennel de prière, risquent d'être source d'incompréhension et de polémiques"
écrivait notamment l'organisation.

Dans ce communiqué aux allures de mise en garde, le CFCM invitait "
les imams et les fidèles à prier pour toutes les victimes d'où qu'elles soient, d'élever des prières pour qu'Israéliens et Palestiniens puissent vite retrouver les voies de la Paix et de la Sécurité et construire ensemble, dans le dialogue, un avenir meilleur pour les générations futures".

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