Tunisie 2023: L'année des défis politiques et économiques par excellence

17:2329/12/2023, vendredi
MAJ: 29/12/2023, vendredi
AA
Le siège de l'Assemblée tunisienne (parlement) dans la capitale Tunis.
Crédit Photo : FETHI BELAID / AFP
Le siège de l'Assemblée tunisienne (parlement) dans la capitale Tunis.

L'année 2023 a démarré en Tunisie avec la tenue du deuxième tour des élections parlementaires, après une interruption de 15 mois due au gel des travaux du précédent Parlement en juillet 2021 et à sa dissolution en mars 2022.

Au cours de l'année 2023, la Tunisie a connu plusieurs crises, à commencer par celle des migrants irréguliers en provenance d'Afrique subsaharienne à la suite des déclarations du président Kais Saied en février dernier, jusqu'à celle de la pénurie d'eau due à la rareté des pluies depuis des mois.


Outre la pénurie de certains produits alimentaires de base comme le pain, le sucre et le café, dont la responsabilité a été imputée aux monopoles et aux forces de l'opposition par le chef d'État. Les experts ont fait savoir que cela était dû au manque de liquidités en devises dans le pays.


Mise en place du nouveau Parlement


Le 25 février dernier, l'Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) a annoncé les noms des 131 vainqueurs du deuxième tour des élections législatives sur un total de 161 sièges, en attendant de pourvoir les postes vacants dans 7 circonscriptions électorales à l'étranger.

Alors que 23 candidats ont pu l'emporter dès le premier tour en décembre 2022, le Conseil a débuté ses travaux avec 154 députés sur 161, en attendant de pourvoir les postes vacants dans 7 circonscriptions électorales à l'étranger.


Environ vingt mois après son gel, l'Assemblée des Représentants du Peuple (ARP/Parlement) a rouvert ses portes en date du 13 mars 2023, lors de la première session convoquée par Saied conformément à un arrêté présidentiel publié au Journal Officiel de la République tunisienne (JORT). Lors de cette session, l'ancien Doyen des Avocats, Ibrahim Bouderbala, a été élu président, tandis que Sawssen Al-Mabrouk et Anouar Marzouki ont été élus adjoints.


Conformément à la nouvelle Constitution tunisienne de juillet 2022, les pouvoirs des parlementaires ont été réduits par rapport à ceux dont ils jouissaient dans la Constitution de 2014. L'article 61 stipule, en effet, que le mandat accordé au député peut être retiré en application des conditions fixées par la loi électorale.


La crise des migrants irréguliers


Le président Kais Saied ne savait pas que lorsqu'il évoquait la situation des immigrés irréguliers en Tunisie, il allait provoquer une vague de vives critiques nationales et internationales.


Lors d'une réunion du Conseil national de sécurité tenue le 21 février, Saied a appelé à la nécessité de mettre fin au phénomène de l'afflux massif de migrants irréguliers en provenance d'Afrique subsaharienne en Tunisie, attribuant l'affaire à
"un arrangement criminel"
visant à modifier la composition démographique du pays.

Le président de la République a également déclaré ce qui suit:
"Cette situation n'est pas naturelle. Il existe un arrangement criminel qui a été préparé depuis le début de ce siècle pour modifier la composition démographique de la Tunisie. Il y a des partis qui ont reçu d'énormes sommes d'argent après 2011 pour baser les migrants irréguliers d'Afrique subsaharienne en Tunisie"
.

Toutefois, ses consolations ultérieures selon lesquelles les clandestins subsahariens ne seraient pas attaqués n'ont pas empêché l'expulsion d'un grand nombre d'entre eux via l'aéroport de Carthage ni le débordement de la situation dans la deuxième plus grande ville tunisienne et première ville accueillant des migrants irréguliers, Sfax, située à 220 km au sud de la capitale.


Début juillet dernier, à la suite de la mort d'un jeune Tunisien lors d'accrochages avec des migrants, les autorités ont expulsé des centaines d'entre eux de la ville de Sfax vers la capitale Tunis ainsi que vers les frontières libyenne et algérienne, selon des organisations de défense des droits humains.


Ces dernières affirment que des centaines de Subsahariens vivent dans l'oliveraie "al-Amra", près de Sfax, après que les forces de sécurité ont évacué, à la mi-septembre, deux places de la ville où étaient concentrés des milliers de migrants clandestins.


Le 16 juillet, la Tunisie a annoncé la signature d'un mémorandum d'accord avec l'Union européenne (UE) sur un
"partenariat stratégique et global"
entre les deux parties dans plusieurs domaines, dont la lutte contre la migration irrégulière, d'un montant de 750 millions d'euros, l'équivalent de 840 millions de dollars.

La soif et la délivrance en décembre


La crise des Subsahariens n'est pas la seule que la Tunisie a connue cette année : la soif est devenue une menace pour les habitants de nombreuses villes tunisiennes après une longue période de sécheresse.


Fin mars 2023, le ministère de l'Agriculture a annoncé, pour la première fois, la distribution d'eau potable par lots jusqu'à fin septembre de la même année.


L'eau est coupée la nuit dans de nombreux quartiers de Tunis depuis fin mars dernier, dans le cadre d'un système visant à programmer la distribution d'eau aux différents établissements du pays ainsi qu'à rationnaliser la consommation.


Suite à la baisse du taux de remplissage des barrages à moins de 25%, le ministère a renouvelé en septembre l'application des mesures du mois de mars visant à limiter l'usage de l'eau par peur de la soif.

Le mois de décembre a levé le risque de soif pour la Tunisie, après que plusieurs stations de surveillance météorologique ont enregistré des précipitations supérieures à 100 mm dans de nombreuses régions tunisiennes du nord au sud, et que le taux de remplissage des barrages a enfin dépassé les 25%.


Crise du pain


En août 2023, de longues files d'attente ont été observées pour acheter du pain. Alors que les autorités accusaient les monopoleurs, les experts économiques ont expliqué que cela était dû aux difficultés financières de la Tunisie qui ont empêché l'approvisionnement en céréales de l'étranger, en plus de la faiblesse des récoltes agricoles qui en a résulté de la sécheresse.


Le 17 août, la justice tunisienne a autorisé l'incarcération du président de la Chambre des patrons de boulangeries, Mohamed Bouanane, pour des soupçons de
"monopole, spéculation alimentaire et blanchiment d'argent"
.

Deux jours auparavant, la présidence avait annoncé, lors de la rencontre au Palais de Carthage, de Saïed avec le Premier ministre, Ahmed El Hachani et un groupe de ministres et responsables, avoir découvert des spéculateurs et des monopoleurs derrière la crise céréalière que traverse le pays.


Arrestation d'opposants


Sur le plan politique, la crise s'est poursuivie avec l'arrestation de nombreux opposants aux mesures du 25 juillet 2021, par les autorités.


Le 11 février 2023, les autorités tunisiennes ont arrêté nombre d'opposants pour complot contre la sécurité de l'État, ce que nie le
"Front du salut national"
.

Parmi les détenus figurent Ghazi Al-Chaouachi, ancien ministre et ancien secrétaire général du Mouvement démocratique, Issam Chebbi, secrétaire général du Parti républicain, et Abdelhamid Jlassi, ancien dirigeant du mouvement d'obédience islamique (Ennahdha), ainsi que Jawhar Ben Moubarak, membre de la direction du Front de salut national et professeur de droit constitutionnel à l'Université, et Chaima Issa, dirigeante du Front de salut national, libérée le 23 juin.


En date du 14 février, Saied a accusé certains détenus de
"conspiration contre la sécurité de l'État"
.

Le 17 avril, les autorités tunisiennes ont également arrêté le chef du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi, chef du parti et président du Parlement dissous.


La Radio Mosaïque FM (privée) a déclaré qu'une enquête est en cours à son sujet sur fond de fuite d'une vidéo d'une conversation qu'il a eue avec des dirigeants du Front de salut national, dans laquelle il a affirmé que l'exclusion de l'islam politique est un projet de guerre civile en Tunisie.

Sont aussi en prison l'ancien Premier ministre Ali Laârayedh, accusé d'avoir envoyé des jeunes dans des
"foyers de tension"
en plus de l'ancien ministre de la Justice Noureddine Bhiri, accusé de comploter contre la sécurité de l'État, ainsi que de nombreux autres dirigeants politiques de l'opposition.

Un nouveau Premier ministre


Le président Saied a décidé, dans un communiqué publié le 2 août dernier, de mettre fin aux fonctions de la Première ministre Najla Bouden et de nommer Ahmed Al-Hachani à sa place, sans évoquer les raisons du limogeage.


L'année se clôture avec les élections locales


Le 24 décembre, la Tunisie a organisé des élections au niveau des conseils locaux, les premières du genre dans l'histoire du pays, étant donné que ces structures sont nouvellement créées conformément à la Constitution de 2022.


Pour la première fois, les élections créeront des conseils locaux qui éliront ensuite des
"conseils régionaux"
qui choisiront à leur tour des
"conseils de districts"
. Ces derniers formeront le
"Conseil suprême des régions et districts"
, qui fera office de deuxième chambre du Parlement.

Lors de ces élections, auxquelles ont participé 11,66% d'un total de 979 271 électeurs, quelque 7 205 candidats étaient en lice pour remporter 2 155 sièges dans 279 conseils locaux.

Mercredi soir, l'ISIE a annoncé la victoire de 1 348 candidats au premier tour des élections des conseils locaux, qui se sont tenues dimanche, expliquant que le second tour sera organisé dans 781 circonscriptions électorales, sans donner plus de précisions.


À lire également:



#Tunisie
#2023
#Arrestations
#Bilan
#Céréales
#Conspiration
#défis économiques
#défis politiques
#Ennahdha
#Kais Saied
#migrants irréguliers
#monopole
#Opposition
#Pénurie
#pluie
#politique
#produits alimentaires
#Rached Ghannouchi
#Sécheresse
#Subsahariens