L'Afrique ne doit pas redevenir un champ de "bataille géostratégique", prévient l'UA

12:1728/05/2023, Pazar
MAJ: 29/05/2023, Pazartesi
AFP
Le président de la Commission de l'Union africaine, Moussa Faki Mahamat. Crédit Photo: Amanuel Sileshi / AFP
Le président de la Commission de l'Union africaine, Moussa Faki Mahamat. Crédit Photo: Amanuel Sileshi / AFP

L'Union africaine (UA) a averti jeudi que l'Afrique ne devait pas redevenir un champ de "bataille géostratégique", au moment où la Russie et l'Ukraine en guerre rivalisent pour accroître leur influence respective sur le continent.

Le chef de la diplomatique ukrainienne, Dmytro Kouleba, actuellement en tournée dans plusieurs pays africains, a appelé le continent à soutenir Kiev face à Moscou et évoqué jeudi l'adoption d'une
"première stratégie africaine".

"Dans ce contexte international d'affrontement, des intérêts géopolitiques divergents, la volonté des uns et des autres menace de transformer l'Afrique en terrain de bataille géostratégique, recréant de ce fait une nouvelle version de la Guerre froide",
a mis en garde le président de la Commission de l'UA, Moussa Faki Mahamat.

"Dans ce jeu à somme nulle, où les gains des autres se traduisent par des pertes pour l'Afrique, nous devons résister à toutes les formes d'instrumentalisation de nos Etats membres",
a-t-il poursuivi.

Moussa Faki Mahamat s'exprimait à la tribune de l'Union africaine à Addis Abeba, à l'occasion du 60e anniversaire de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA), fondée le 25 mai 1963 dans la capitale éthiopienne et devenue l'UA en 2002.


L'Afrique est au coeur de luttes d'influences internationales qui ont redoublé depuis l'invasion russe de l'Ukraine, en février 2022.

De nombreux pays africains sont très dépendants pour leur alimentation des importations de céréales de Russie et d'Ukraine. Un accord permettant l'exportation des céréales ukrainiennes par la mer Noire, parrainé par l'ONU et la Turquie et conclu en 2022, a été reconduit la semaine dernière pour deux mois. 


"Neutralité"


Frappée par de lourdes sanctions occidentales, Moscou cherche des soutiens en Asie et en Afrique, où de nombreux Etats n'ont pas ouvertement condamné l'intervention militaire russe.


La Russie a multiplié ces dernières années les initiatives sur le continent, visant à se poser comme alternative aux anciennes puissances coloniales. Un sommet Russie-Afrique, le deuxième du genre, est prévu fin juillet à Saint-Pétersbourg.


Au début de l'année, le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov s'est en outre rendu dans plusieurs pays africains, dont le Mali, l'Érythrée et le Soudan.

De son côté, son homologue ukrainien effectue sa deuxième tournée africaine en moins d'un an.


"Nous avons récemment adopté notre première stratégie africaine et intensifié notre dialogue politique avec beaucoup de pays sur le continent",
a dit jeudi M. Kouleba, dans une déclaration publiée à l'occasion du 60e anniversaire de l'OUA.

Il a annoncé l'ouverture cette année de nouvelles ambassades ukrainiennes en Afrique et l'organisation du
"premier sommet Ukraine-Afrique".

M. Kouleba était jeudi au Rwanda, après le Maroc et l'Ethiopie. Mercredi, à Addis Abeba, il a appelé certains pays d'Afrique à renoncer à la
"neutralité"
qu'ils affichent dans le conflit et à soutenir Kiev face à Moscou. 

En février, 22 des 54 Etats membres de l'UA se sont abstenus ou n'ont pas pris part au vote de la dernière résolution en date de l'Assemblée générale de l'ONU appelant la Russie à retirer ses forces d'Ukraine. Deux - Erythrée et Mali - avaient voté contre.


Des pays comme le Sénégal et l'Afrique du Sud se sont ainsi abstenus.

Parallèlement, une mission africaine menée par six dirigeants africains pour discuter d'un règlement du conflit en Ukraine, et dont l'annonce a été faite par Pretoria, doit se rendre en Ukraine et en Russie.


Selon M. Lavrov, cette mission qui inclura outre l'Afrique du Sud, le Sénégal, la Zambie, le Congo, l'Ouganda et l'Egypte, est attendue en Russie en juin ou juillet.


A la tribune de l'UA jeudi, le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a de son côté appelé à renforcer l'unité de l'Afrique.
"Aujourd'hui notre continent (...) devient rapidement une voix forte dans l'arène mondiale",
s'est-il réjoui.

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