Philippines: l'alliance entre les clans au pouvoir Marcos et Duterte a fait long feu

10:417/02/2024, mercredi
AFP
Le président entrant des Philippines Ferdinand Marcos Jr (à gauche) et le président sortant Rodrigo Duterte (C) participent à la cérémonie d'inauguration de Marcos sur le terrain du palais présidentiel de Malacanang à Manille le 30 juin 2022.
Crédit Photo : FRANCIS R. MALASIG / PISCINE / AFP (Archive)
Le président entrant des Philippines Ferdinand Marcos Jr (à gauche) et le président sortant Rodrigo Duterte (C) participent à la cérémonie d'inauguration de Marcos sur le terrain du palais présidentiel de Malacanang à Manille le 30 juin 2022.

Moins de deux ans après l'élection à la présidence des Philippines de Ferdinand Marcos Jr, fils du dictateur déchu, l'alliance entre la famille Marcos et celle de son prédécesseur Rodrigo Duterte a éclaté de façon spectaculaire.

L'unité de façade entre les familles Marcos et Duterte, qui se sont alliées pour les élections de 2022, a laissé la place à des accusations mutuelles de toxicomanie, des menaces et des rumeurs de coup d'État.


Ferdinand Marcos, le fils et homonyme de l'ancien dictateur du pays, a remporté la présidence par une majorité écrasante après une campagne massive de désinformation sur les réseaux sociaux qui lui a permis de redorer l'image de sa famille, autrefois honnie.


Sa colistière à la vice-présidence Sara Duterte, fille de l'ancien président Rodrigo Duterte, l'a aidé à convaincre l'électorat du fief de sa famille, l'île de Mindanao.

Les observateurs s'attendaient à des tensions entre les clans Marcos et Duterte avant les élections de mi-mandat de 2025 et les élections présidentielles de 2028, mais l'alliance a éclaté bien plus tôt.


La politique aux Philippines a longtemps été une affaire de famille, avec plusieurs clans aux commandes du pays pendant des générations, formant des alliances de convenance.


"Drogué"


Lors d'un meeting dans son fief de Davao (sud) fin janvier, l'ex-président Rodrigo Duterte a accusé Ferdinand Marcos d'être
"un drogué"
, son fils Sebastian Duterte ajoutant qu'il devrait démissionner.

Le président en exercice a répliqué le lendemain en affirmant que la forte consommation de fentanyl, un puissant opiacé de synthèse, de l'ex-président avait affecté sa santé.

Aucun des deux hommes n'a fourni de preuve de la consommation présumée de drogue de l'autre.


Ces échanges acerbes semblent avoir été déclenchés par le soutien de Ferdinand Marcos à une campagne pour modifier la Constitution, entrée en vigueur après le renversement populaire de son père appuyé par l'armée en 1986.


Le président s'est dit favorable à des modifications de la Constitution pour autoriser davantage d'investissements étrangers, mais les Duterte s'y opposent et les critiques craignent que ce processus n'ouvre la voie à une prolongation de son mandat.


M. Duterte craint également, selon des analystes, que sa fille soit mise à l'écart et que le président en exercice n'autorise pas la Cour pénale internationale à se rendre aux Philippines pour enquêter sur la
"guerre contre la drogue"
de l'ex-président, qui a fait des milliers de morts hors de tout cadre légal.

La situation s'est encore aggravée la semaine dernière lorsque Rodrigo Duterte a appelé Mindanao, deuxième plus grande île de l'archipel, à faire sécession, au risque d'être accusé de sédition.


Le conseiller à la sécurité nationale Eduardo Ano a averti que le gouvernement utiliserait
"son autorité et ses forces pour réprimer et arrêter toute tentative de démembrement de la République"
.

"Traitement méprisable"


Le chef des forces armées des Philippines, le général Romeo Brawner, s'est rendu le week-end dernier dans des bases militaires de Mindanao, appelant les troupes à être loyales envers les autorités
"constitutionnelles"
.

Cette visite fait suite à des rumeurs rapportées par les médias locaux mais démenties par les autorités sur un complot visant à démettre Ferdinand Marcos.

L'appel à la sécession envoie
"un message fort au président signifiant qu'il n'a pas très bien traité les membres de la famille Duterte"
, indique à l'AFP Dennis Coronacion, professeur de sciences politiques à l'université de Santo Tomas.

Des fissures ont commencé à apparaître au début du mandat de M. Marcos après qu'il a refusé à Sara Duterte le ministère de la Défense qu'elle convoitait et lui a confié le portefeuille de l'Éducation.


Sara Duterte a dénoncé la semaine dernière
"un traitement méprisable"
à son égard, même si elle n'a pas accusé directement Ferdinand Marcos.

Ce dernier a également cherché à rétablir les relations privilégiées avec l'allié traditionnel des Philippines, Washington, après un refroidissement sous Duterte, qui s'était rapproché de Pékin.

En novembre, Ferdinand Marcos avait indiqué que la possibilité pour Manille de rejoindre la CPI était
"à l'étude",
quatre ans après son retrait décidé par Rodrigo Duterte en réponse à l'ouverture d'une enquête sur sa guerre contre la drogue. Mais le mois dernier, le président a affirmé que le gouvernement ne coopérerait pas à l'enquête de la CPI.

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