Trente ans après le meurtre raciste d'un adolescent à Londres, la frustration sans fin de ses parents

15:3422/04/2023, samedi
MAJ: 22/04/2023, samedi
AFP
Crédit photo: Niklas HALLE'N / AFP
Crédit photo: Niklas HALLE'N / AFP

Le 22 avril 1993, Stephen Lawrence, jeune étudiant noir, était victime d'un crime raciste à Londres. Ce meurtre avait choqué le Royaume-Uni et remis en question les pratiques de la police mais trente ans plus tard, ses parents sont fatigués des promesses non-tenues.

Stephen Lawrence, âgé de 18 ans et féru d'architecture, attendait le bus avec un ami à Eltham dans le sud-est de Londres quand il avait été agressé et poignardé par une bande de cinq jeunes blancs.


Les défaillances de la police dans l'enquête sur ce crime - pour lequel seulement deux hommes, Gary Dobson et David Norris, ont fini par être condamnés en 2012 à 15 et 14 ans de prison - avaient donné lieu à un rapport en 1999 qui avait sonné comme un coup de tonnerre en qualifiant Scotland Yard d'
"institutionnellement raciste".

Aujourd'hui, Neville Lawrence, le père de Stephen, ne cache toutefois pas sa frustration.


Je ne vois pas de changement.

Les personnes noires redoutent toujours, selon lui, que les forces de l'ordre ne les protègent pas et lui-même veut continuer d'oeuvrer pour que ses proches puissent
"marcher dans les rues sans craindre d'être poignardés"
.

Le mois dernier, un nouveau rapport accablant pour la police a été publié. Il a conclu que Scotland Yard était
"institutionnellement
(...)
raciste, sexiste et homophobe".

Le rapport accuse:


Les gens de couleur sont trop surveillés et sous-protégés.

Ces dernières années, les agents de la police londonienne ont été sous le feu des critiques, accusés d'utiliser une force disproportionnée contre les personnes noires et même de pratiquer la fouille à nu sur des écoliers.


Des biais systémiques


Pour que le meurtre de Stephen ne tombe pas dans l'oubli, sa mère a milité pendant des années, et créé une organisation - le Stephen Lawrence Charitable Trust - pour venir en aide aux jeunes défavorisés qui veulent se lancer dans l'architecture et le design.


Doreen Lawrence, qui a été nommée en 2013 membre à vie de la Chambre des Lords, a déploré elle aussi cette semaine l'absence de changements au sein de la police, et estimé que les agents pouvaient être
"aussi brutaux qu'ils le souhaitaient"
sans avoir à rendre de comptes.

"Je ne sais pas combien d'enquêtes et d'examens supplémentaires il faut pour dire la même chose - et toujours pas de changement, et toujours des démentis"
, a-t-elle déclaré à la BBC.

Depuis 2018, une journée d'hommage à Stephen Lawrence est organisée chaque année le 22 avril. Une cérémonie a eu lieu samedi matin à l'église de St Martin-in-the-Fields, sur Trafalgar Square à Londres.

Le chef de la police londonienne, Mark Rowley, a publié un communiqué pour l'anniversaire de la mort de Stephen, afin de présenter
"ses condoléances à la famille Lawrence pour cette perte inimaginable"
et ses excuses pour les "échecs passés".

"Si des progrès significatifs ont été accomplis
(...)
, il est désormais clair que nous n'avons pas été assez loin pour nous attaquer aux défaillances culturelles et systémiques qui permettent à la discrimination de se propager"
dans la police, a-t-il reconnu. Il a aussi évoqué des
"biais systémiques"
mais sans toutefois utiliser l'expression de
"racisme institutionnel".

Son refus de reprendre ces mots lors de la publication en mars du rapport sur la police a été un point de désaccord essentiel et donné lieu à un vif débat.


Pour Neville Lawrence,
"tant qu'ils ne l'accepteront pas, ils ne pourront pas y remédier".

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