La Syrie se libère de sa chape de plomb

09:3222/09/2025, Pazartesi
Yasin Aktay

Dire que "la vie reprend normalement en Syrie" après la chute d’un régime de soixante ans d’occupation et de despotisme serait inexact. Car pendant toutes ces décennies, rien n’a jamais été normal. Damas, joyau du monde islamique, était privée de son rôle historique et condamnée à une torpeur artificielle. Jadis, à l’époque ottomane, résider à Damas impliquait même le paiement d’un impôt spécial : une preuve du statut singulier de cette cité où chaque ruelle porte la mémoire de compagnons du Prophète

Dire que "la vie reprend normalement en Syrie" après la chute d’un régime de soixante ans d’occupation et de despotisme serait inexact.


Car pendant toutes ces décennies, rien n’a jamais été normal. Damas, joyau du monde islamique, était privée de son rôle historique et condamnée à une torpeur artificielle. Jadis, à l’époque ottomane, résider à Damas impliquait même le paiement d’un impôt spécial : une preuve du statut singulier de cette cité où chaque ruelle porte la mémoire de compagnons du Prophète et de grands savants musulmans.


Mais ces soixante dernières années, Damas a été prisonnière d’une clique incapable de distinguer entre gouverner un pays et diriger une organisation criminelle.
Aujourd’hui, la Syrie tente de se débarrasser de cette chape mortuaire.

Le défi du retour et la reconstruction


Si Damas retrouve sa trajectoire naturelle, les obstacles restent immenses. Des millions de Syriens contraints à l’exil depuis quatorze ans ne trouvent en rentrant que des ruines.
Le problème central est là : où loger ces familles ?
La reconstruction d’un habitat digne est devenue une urgence nationale. Une vaste mobilisation internationale pour le logement pourrait non seulement offrir un toit aux réfugiés, mais aussi devenir le moteur de la relance économique du pays. Déjà, l’arrivée de Syriens de retour a provoqué une flambée des prix de l’immobilier. Avec leurs économies, ils investissent dans le logement, créant une bulle qui risque de susciter une hostilité contre ceux qui n’avaient fait que fuir la guerre et la terreur. Pourtant, sur le terrain, les signes d’une renaissance sont visibles : rues embouteillées, marchés bondés, Hamidiyé envahie de foule — la Syrie vibre à nouveau.

Les mosquées au cœur de la vie


Symbole du sunnisme, la grande mosquée des Omeyyades avait été défigurée par le régime, transformée en lieu de cérémonies chiites, presque interdite aux fidèles. Aujourd’hui, elle retrouve sa vocation : espace spirituel, lieu de rencontre, d’enseignement et de sociabilité. Les prêches, abandonnés depuis longtemps, réapparaissent dans toutes les mosquées. Le grand mufti, Usame el-Rufaï, a lancé une campagne pour redonner aux mosquées toutes leurs fonctions naturelles dans une société islamique. Même une simple célébration religieuse, naguère soumise à la censure et aux autorisations humiliantes du régime, peut désormais se tenir librement. Cette liberté retrouvée est vécue comme un immense bienfait.


Une vie sans peur de la Muhaberat


Depuis neuf mois, les Syriens respirent sans la terreur d’être arrêtés sur dénonciation pour une phrase prononcée dans une conversation. Ils commercent sans craindre que leurs biens soient confisqués par le régime. Car sous le Baas, réussir économiquement faisait de vous une cible pour les sbires de la Muhaberat.


Le régime d’Assad n’a respecté personne, pas même les Nusayris dont il avait pourtant fait ses complices. Déplacés des côtes vers Damas, ils ont été utilisés comme instruments de la répression, logés dans des conditions misérables, sacrifiés au profit d’une poignée de profiteurs. Contrairement à ce que craignaient certains, le nouveau pouvoir n’a pas instauré de revanche sanglante contre les minorités : une leçon adressée à tous ceux qui brandissent hypocritement la carte des
"droits des minorités".

La Syrie n’a pas fini de panser ses plaies, mais une chose est certaine : elle s’arrache enfin à l’emprise d’un régime mafieux pour renaître.

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