Échange de prisonniers entre Washington et Caracas, un proche de Maduro libéré

11:2321/12/2023, jeudi
MAJ: 21/12/2023, jeudi
AFP
Le président vénézuélien Nicolas Maduro accueille l'homme d'affaires colombien Alex Saab au palais présidentiel de Miraflores, à Caracas, le 20 décembre 2023.
Crédit Photo : FEDERICO PARRA / AFP
Le président vénézuélien Nicolas Maduro accueille l'homme d'affaires colombien Alex Saab au palais présidentiel de Miraflores, à Caracas, le 20 décembre 2023.

Les États-Unis ont annoncé mercredi la libération de dix Américains détenus au Venezuela, en échange de laquelle Joe Biden a accordé sa clémence à Alex Saab, un proche du président vénézuélien Nicolas Maduro accusé de lourdes malversations par la justice américaine.

Celui-ci a été accueilli en grande pompe à Caracas à l'aéroport puis au palais présidentiel.


Le président Maduro a lancé:


Nous avons réussi. Je veux accueillir cet homme courageux. Après 1.280 jours de séquestration, la vérité a triomphé.

"Aujourd'hui, le miracle de la liberté, de la justice, s'est réalisé"
, a déclaré M. Saab dans une brève allocution.

Le président américain, lui, n'a pas mentionné Alex Saab dans son communiqué. Sa libération a été une décision
"extrêmement difficile"
, selon une haute responsable de la Maison Blanche.

Joe Biden a indiqué que sur les dix Américains libérés, six étaient détenus par le Venezuela
"sans fondement"
, et il s'est dit
"reconnaissant que leur calvaire soit terminé".

Le président américain a annoncé par ailleurs que les autorités vénézuéliennes avaient remis aux États-Unis l'homme d'affaires Leonard Francis, impliqué dans un énorme scandale de corruption touchant la marine américaine.


L'accord passé entre les États-Unis et le Venezuela, dans lequel le Qatar a joué un rôle de médiation, voit aussi Caracas libérer au moins vingt prisonniers politiques.

Parmi les Vénézuéliens libérés figure un groupe de syndicalistes arrêtés en juillet 2022 lors de manifestations pour des augmentations de salaire, et condamnés par la suite à 16 ans de prison . 


Une figure de l'opposition vénézuélienne, Roberto Abdul, accusé de
"trahison"
et de
"conspiration avec une puissance étrangère"
, a aussi retrouvé la liberté dans le cadre de cet accord. 

Interpellé par des journalistes, Joe Biden a estimé qu'il était justifié de négocier avec les autorités vénézuéliennes
"parce que nous libérons des Américains, des gens détenus illégalement. Nous avons passé un accord avec le Venezuela pour l'organisation d'élections libres, et jusqu'ici, ils ont tenu leurs engagements, et voilà tout."

Interrogé pour savoir si cet échange de prisonniers risquait d'encourager d'autres pays hostiles aux États-Unis, Joe Biden, qui mène une politique volontariste pour libérer les Américains détenus à l'étranger, a répondu sèchement:
"non."

Détournement


Alex Saab, considéré comme un proche du président Nicolas Maduro, était détenu aux États-Unis depuis octobre 2021.


L'homme, que de nombreux experts décrivent en cheville ouvrière des affaires financières du Venezuela à l'étranger, avait été extradé en octobre 2021 du Cap-Vert vers les États-Unis.


D'origine colombienne, il est accusé par la justice américaine d'avoir mis en place un système de détournement d'aide alimentaire au profit du dirigeant socialiste et de son gouvernement.

Une haute responsable de la Maison Blanche a déclaré, pour défendre cette remise en liberté:


Au fond, ce sont dix Américains et un fugitif échangés contre une personne qui retourne au Venezuela.

Parmi les Américains libérés figurent, selon une ONG du Venezuela, deux anciens militaires, Luke Alexander Denman et Airan Berry, qui purgeaient une peine de 20 ans pour une tentative ratée de renverser Nicolas Maduro en 2020.


Le fugitif remis aux États-Unis, l'homme d'affaires malaisien Francis Leonard, surnommé "Fat Leonard", avait été arrêté au Venezuela en septembre 2022, après avoir fui la Californie où il était assigné à résidence.


Ce sous-traitant militaire avait plaidé coupable en 2015 d'avoir soudoyé des officiers de l'US Navy, dans le plus gros scandale de corruption de l'histoire de la marine américaine. 


L'homme a, selon une haute responsable de la Maison Blanche, distribué de l'argent liquide, des voyages, les services de prostituées, et divers cadeaux tels que
"des cigares cubains, du boeuf de Kobé ou des cochons de lait"
afin de décrocher des contrats pour ses chantiers navals.

Les relations entre Washington et Caracas, extrêmement crispées pendant la présidence de Donald Trump, se sont réchauffées récemment. En octobre, pouvoir et opposition vénézuéliens ont trouvé un accord autorisant la présence d'observateurs internationaux lors de la présidentielle de 2024.

Washington avait allégé pour six mois ses sanctions économiques, imposées en 2019 pour tenter d'évincer Nicolas Maduro du pouvoir. Dans la foulée, Caracas avait libéré cinq prisonniers politiques.


Joe Biden est prêt à d'importantes concessions pour faire libérer des ressortissants américains détenus à l'étranger, l'une des priorités affichées de son mandat. Il y a un an, il avait accepté un échange entre Brittney Griner, star américaine du basket détenue en Russie, et Viktor Bout, marchand d'armes russe d'envergure internationale.


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