Marine Le Pen, Présidente du Rassemblement National ( RN), en visite au Sénégal. Crédit Photo: APANEWS
La candidate aux deux dernières élections présidentielles françaises a entamé lundi soir une visite de trois jours dans la capitale sénégalaise.
Près de six ans après sa dernière visite au Tchad où elle avait été reçue par le défunt président Idriss Déby Itno à l’occasion de la campagne présidentielle de 2017, Marine Le Pen est de retour sur le continent africain. La cheffe de fil de l’opposition française est au Sénégal depuis lundi, pour une visite de trois jours.
Si l’agenda spécifique de ce voyage est inconnu du grand public, nous savons au moins que le leader de l’extrême droite française compte rencontrer plusieurs acteurs politiques et de la Société civile. Un tête-à-tête avec le président Macky Sall semble toutefois peu probable au vue des relations intrinsèques qu’entretient ce dernier avec son homologue français.
A quoi peut-on donc s’attendre de cette visite de Mme Le Pen dont la famille politique a longtemps été hostile aux relations entre Paris et le continent noir ? La réponse à cette interrogation figure en partie dans une tribune qu’elle a publiée, lundi 16 janvier, dans le quotidien français l’Opinion. Elle y détaille sa vision des relations entre l’Europe et l’Afrique avec le Sénégal comme fer de lance de cette future coopération.
"J’ai défendu à plusieurs reprises un élargissement raisonnable des membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. C’est le seul moyen pour l’ONU de retrouver les voies de l’universel et donc sa légitimité à dire le droit. Par esprit de justice et parce que rien ne serait pire aussi qu’un système onusien donnant le sentiment d’une nomenklatura de puissants, il m’apparaît évident qu’un représentant de l’Afrique doit siéger comme membre permanent du Conseil de sécurité "
, déclare-t-elle.
Le Sénégal membre permanent du Conseil de Sécurité de l’Onu ?
Le pays de la Teranga dispose d’une très longue tradition diplomatique "
où se mêlent l’intransigeance et la nuance, la fermeté et la souplesse
". Forte de cette expérience, Dakar a tous les atouts, selon Mme Le Pen, pour représenter l’Afrique au cercle très restreint des pays ayant le droit de véto sur les questions internationales.
"
Etat de droit respectueux des alternances politiques, pays à majorité musulmane où les chrétiens vivent en fraternité et en parfaite citoyenneté dans une société unie autour de ses cultures séculaires, doté d’une diplomatie rayonnante, je pense que le Sénégal pourrait assumer cette charge si particulière. Cette proposition pourrait devenir celle de la France auprès des quatre autres membres permanents du Conseil de sécurité
", affirme-t-elle.
Comme tout acte posé par les politiques, l’appel de Marine Le Pen n’a cependant rien d’anodin. Pour Mouhamadou Lamine Bara Lo, Expert en Politique étrangère, Défense et Sécurité et Président du mouvement politique Farlu (Détermination en langue wolof), celui-ci peut s’apprécier sous plusieurs angles.
" Cet appel rentre fondamentalement dans une démarche de toilettage de l’image de Mme Marine Le Pen. En le faisant, elle manifeste un intérêt pour les pays africains d’abord, et particulièrement pour ceux qui ont été ou sont dans la zone d’influence française, et qui comptent une diaspora importante en France et pour la plupart naturalisée. Il y a une dynamique électorale qu’il faut d’ores et déjà comprendre
", analyse-t-il.
La question de la réforme de la gouvernance mondiale pour plus de justice et d’équité entre les pays est de plus en plus brandie. En s’invitant sur ce débat, Mme Le Pen "
veut aussi prouver au public français et international, son intérêt pour les enjeux géopolitiques. Et de fait, elle renforce son image de présidentiable
", poursuit M. Lo.
A l’en croire, les questions de politiques internationales sont importantes pour tout […] et les candidats, pour renforcer leur image, ont tendance à mettre en avant leur capacité à les comprendre et à pouvoir se positionner. Et la question de la réforme du Conseil de Sécurité de l’Onu est une question internationale plus qu’actuelle, relève-t-il.
L’écrivain sénégalais, Khalifa Touré n’en dit pas moins quand il assure que
" la visite de Marine Le Pen au Sénégal, au-delà des apparences, entre dans le cadre d'un plan d'offensive politique du Rassemblement National sur un territoire considéré peu ou prou comme un pré-carré français ".
Et en se déplaçant à Dakar, la cheffe de fil de l’opposition française "
a trois cibles : essentiellement, l'élite française qui pèse et décide politiquement ; l'électorat de l'extrême droite qui s'est sensiblement étendu et l'élite africaine qui cherche le pouvoir international à travers un siège permanent au Conseil de Sécurité "
, note M. Touré.
Quid de la position de l’Union africaine ?
Depuis quelques années, les pays du continent noir, à travers l’organisation régionale qu’est l’Union africaine, tentent de parler d’une même voix sur les questions internationales. Qu’il s’agisse de l’élargissement des membres permanent du Conseil de Sécurité ou de l’obtention d’un siège au sein du G20, les Etats africains portent leurs choix sur l’organisation panafricaine. Son président en exercice, le Sénégalais, Macky Sall, a ainsi obtenu des promesses de soutien pour l’adhésion de l’UA au G20.
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