En France, un journaliste convoqué par la DGSI dénonce une inquiétante dérive pour la liberté de la presse

News Service
18:189/12/2022, vendredi
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Geoffrey Livolsi, journaliste et cofondateur du journal d'investigation « Disclose ». Capture d'écran YouTube
Geoffrey Livolsi, journaliste et cofondateur du journal d'investigation « Disclose ». Capture d'écran YouTube

Le journaliste et cofondateur du journal d'investigation « Disclose », Geoffrey Livolsi, convoqué par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), suite à une enquête sur l'Armée française, a dénoncé, ce jeudi, "une inquiétante dérive pour la liberté de la presse" en France.

Interrogé par l'Agence Anadolu (AA), Geoffrey Livolsi a déploré sa convocation ainsi que celles de ses confrères de Radio France, Benoît Collombat et Jacques Monin, le mercredi 14 décembre, par les policiers de la section des atteintes au secret de la défense nationale de la DGSI, c'est-à-dire des services de renseignement intérieur de la France.

 «
 Un climat malsain pour notre démocratie »

Rappelant qu'un total de quatre journalistes ont subi le même sort cette année dans l'Hexagone, le cofondateur de Disclose a rappelé que huit autres journalistes ont également été convoqués par la DGSI en 2019.


"C’est une inquiétante dérive pour la liberté de la presse en France qui crée un climat malsain pour notre démocratie"
, a-t-il déploré, s'interrogeant s'il est
"encore possible d’enquêter sur l’armée française".


Les autorités hexagonales reprochent aux trois journalistes d'investigation, d'avoir publié sur
« France Inter »
, en mars 2018, des informations relatives à des faits de favoritisme dans des marchés publics au sein du ministère des Armées.


L'enquête de Geoffrey Livolsi, Benoît Collombat et Jacques Monin, avait révélé que certains hauts gradés avaient favorisé, pendant plusieurs années, des sociétés privées dans l’attribution de contrats de transport militaire, notamment au sein du dispositif
« Barkhane »
au Sahel.


Soulignant que
"ces informations étaient et restent d’intérêt public",
le cofondateur de Disclose rappelle que celles-ci font l’objet d’une enquête du Parquet national financier (PNF) pour favoritisme et trafic d’influence depuis 2017.

« Une énième atteinte à la liberté de la presse »

Le journal d'investigation précise que "cette convocation, sous le statut d’audition libre, s’inscrit dans le cadre d’une commission rogatoire délivrée par un magistrat" et qu'elle intervient près de cinq ans après la publication de l’enquête sur France Inter.


Rapportant que la procédure, déclenchée en 2021,
"vise directement les journalistes pour avoir révélé l’identité d’un membre d’une unité des forces spéciales"
, Disclose précise que, cependant,
"le haut gradé évoqué dans l’enquête n’est pas en mission sur des terrains de conflit
" et qu'il
"travaille au sein des bureaux de l’État-major, dans les services de logistique".


Le journal d'investigation indique également que Geoffrey Livolsi, Benoît Collombat et Jacques Monin sont passibles d’une peine de cinq ans de prison et de 75 000 euros d’amende.


Toutefois, les trois journalistes n'ont jamais été informés qu'une enquête judiciaire les visait ainsi que leurs sources.


"Ces convocations constituent une énième atteinte à la liberté de la presse et un inquiétant précédent pour les journalistes enquêtant sur l’armée"
, a déploré le journaliste Geoffrey Livolsi, cofondateur de Disclose, qui rappelle qu'il s'agit de la troisième enquête des services de renseignement français ciblant plusieurs journalistes de leur média au nom du secret de la défense nationale, et en contournant le droit de la presse.
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