Boycott: Quand la géopolitique influence les JO

David Bizet
15:449/05/2024, jeudi
MAJ: 9/05/2024, jeudi
Yeni Şafak
Un manifestant porte un autocollant avec l'inscription "le génocide n'est pas un sport, boycott d'Israël aux Jeux olympiques de Paris" lors d'une manifestation "contre le racisme, contre l'islamophobie", à Paris le 21 avril 2024.
Crédit Photo : Alain JOCARD / AFP
Un manifestant porte un autocollant avec l'inscription "le génocide n'est pas un sport, boycott d'Israël aux Jeux olympiques de Paris" lors d'une manifestation "contre le racisme, contre l'islamophobie", à Paris le 21 avril 2024.

Alors que la Russie se voit privée des JO 2024 en raison de la guerre en Ukraine, la participation d'Israël malgré les atrocités commises à Gaza suscite des interrogations. Un débat qui dévoile la nature politique de cet événement mondial, et qui pose la question, récurrente, du boycott.

Les Turcs, premiers à avoir boycotté les JO


Depuis les premiers Jeux Olympiques dit du "renouveau" en Grèce en 1896, les questions géopolitiques ont souvent pesé sur la participation des nations. Un exemple notable remonte à cette époque où la délégation ottomane a décliné l'invitation, en raison des différends politiques, notamment frontaliers, avec la Grèce. Cette tendance, initiée par les Turcs, s'est poursuivie au fil des décennies, marquant des moments clés de l'histoire olympique.


En 1936, alors que le régime hitlérien prenait de l'ampleur en Allemagne, les États-Unis envisageaient de boycotter les Jeux. Cependant, sous l'impulsion d'Avery Brundage, président du comité olympique américain, le boycott fut évité, arguant que les athlètes juifs étaient traités équitablement en Allemagne.

Le boycott, vecteur de l'émancipation des peuples


Des boycotts ultérieurs ont également été motivés par des conflits géopolitiques, notamment ceux du Moyen-Orient et liés à la question de l'émancipation des peuples.


En 1956, l'Égypte, l'Irak et le Liban ont choisi de ne pas participer aux Jeux de Melbourne pour protester contre l'intervention militaire franco-britannique à Suez. La même année, d'autres nations comme la Suisse, les Pays-Bas et l'Espagne se sont retirées pour dénoncer l'intervention des chars soviétiques à Budapest.

Les années suivantes ont également été marquées par des boycotts notables. En 1976 d'abord, vingt-deux pays africains ont quitté les Jeux de Montréal pour protester contre l'absence de sanctions contre la Nouvelle-Zélande, en raison de sa relation sportive avec l'Afrique du Sud de l'apartheid. Quatre ans plus tard, une soixantaine de pays musulmans ou proches des États-Unis ont décidé de boycotter les Jeux de Moscou après l'invasion de l'Afghanistan par l'Union soviétique en 1979.


Pourtant, malgré la récurrence des crises internationales et des opérations militaires occidentales dans le monde musulman qui ont suivi l'effondrement du mur de Berlin, nous n'assistons plus à de boycotts notables. Aucun mouvement de boycott des jeux olympiques n'a été lancé, ni lors de la deuxième intifada, ni lors de l'invasion américaine de l'Irak, ni pour aucun autre évènement.


Le gouvernement chinois, qui opère un génocide culturel sur les populations Ouïgours, a même pu organiser des olympiades en 2008 et en 2022, sans être inquiété par cette menace économique et diplomatique que représente le boycott.

Que s'est-il passé pour que la fin de la guerre froide rime avec la fin du boycott olympique? Le multilatéralisme et la volonté de ne pas blesser un partenaire économique ont-t-ils eu raison de la solidarité internationale ? La soif d'exister sportivement est-elle plus forte que la vie des Gazaouis ?


Si le boycott souligne la manière dont les tensions géopolitiques peuvent interférer et avoir un impact, se taire et accepter qu'Israël puisse participer à cette édition des Jeux olympiques résonne comme une défaite de la morale et de l'engagement militant pour le droit des peuples à disposer d'eux mêmes.


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