France: l'ONG Sherpa espère que Lafarge soit poursuivi pour "complicité de crimes contre l'humanité" en Syrie

11:0121/10/2024, lundi
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Le cimentier Lafarge est soupçonné d'avoir versé, entre 2013 et 2014, une somme estimée à 13 millions d'euros à des groupes terroristes dont Daech, pour espérer poursuivre ses activités sur place alors que la Syrie était déjà à feu et à sang.
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Le cimentier Lafarge est soupçonné d'avoir versé, entre 2013 et 2014, une somme estimée à 13 millions d'euros à des groupes terroristes dont Daech, pour espérer poursuivre ses activités sur place alors que la Syrie était déjà à feu et à sang.

Les magistrats instructeurs en charge de l'enquête tentaculaire portant sur les activités du cimentier français Lafarge en Syrie, ont renvoyé le groupe et 4 de ses anciens dirigeants devant le tribunal correctionnel, pour des faits qualifiés de "financement du terrorisme" et "violation d'un embargo".

Cette décision, rendue publique mercredi dernier, ne présume en rien des suites qui seront données à l'autre volet de ce dossier, qui concerne les accusations de
"complicité de crimes contre l'humanité"
formulées à l'encontre de Lafarge.

Dans une interview à Anadolu, Anna Kiefer, juriste en charge du dossier Lafarge pour l'ONG Sherpa, est revenue sur les enjeux de cette procédure et sur les attentes de son organisation.

Elle souligne, à cet effet, que
"l'instruction pour complicité de crimes contre l'humanité se poursuit"
en parallèle avec la décision rendue mercredi dernier mais qu'il s'agit déjà pour Sherpa
"d'une victoire d'étape"
, même si celle-ci apparaît
"en demie-teinte"
puisque les juges d'instruction ont écarté les salariés syriens de Lafarge, jugeant leur participation à la procédure
"irrecevable".

Les salariés syriens ne pourront pas obtenir réparation lors de ce procès pour financement de terrorisme.

"Ils vont être écartés de ce procès parce qu'ils ne sont pas recevables pour cette infraction",
et c'est la raison pour laquelle
"il est primordial que l'enquête pour complicité de crime contre l'humanité se poursuive, sans quoi les salariés syriens ne pourront pas obtenir réparation"
, poursuit Anna Kiefer.

La juriste souligne, néanmoins, que
"c'est quand même une victoire d'étape"
car:

C'est, à (la connaissance de Sherpa), la première fois qu'une société française et ses dirigeants vont devoir répondre devant la justice, du financement de groupes terroristes.

Et de poursuivre:
"Les multinationales ne peuvent pas rester au-dessus des lois: elles doivent être tenues responsables, lorsqu'elles contribuent, par leurs activités à financer le terrorisme, à alimenter des conflits à l'étranger. L'aide à un groupe qui commet des infractions constitue de la complicité, et on espère que l'enquête pour complicité de crimes contre l'humanité pourra également aboutir".

"On a déjà cette première victoire sur l'aspect du financement de terrorisme mais le plus important pour nous c'est la reconnaissance de la complicité de Lafarge dans les actes commis par ces groupes".

Les ONG Sherpa et ECCHR, précisaient mercredi dernier dans un communiqué de presse commun, que
"deux anciens employés en charge de la sécurité en Syrie et Firas Tlass, un homme d'affaire syrien, intermédiaire dans cette affaire, sont également renvoyés pour financement d'une entreprise terroriste",
tandis que
"l'ancien directeur de la sureté du groupe a bénéficié d'un non-lieu".

Pour rappel, un accord a été passé jusqu'en 2014 entre Lafarge et des organisations terroristes dont Daech pour permettre au fabricant de ciment de se maintenir en Syrie.

Des documents révélés par Anadolu en septembre 2021 montraient que le groupe Lafarge, a régulièrement informé les services de renseignements français, des arrangements conclus avec Daech pour obtenir le maintien de ses activités en Syrie.


Ces échanges et divers PV d'auditions montrent en outre que les services français ont profité de Lafarge pour obtenir des informations sur les activités de Daech, sans jamais mettre en garde le cimentier sur la potentielle qualification pénale des activités auxquelles il se livrait.


Le cimentier est soupçonné d'avoir versé, entre 2013 et 2014, une somme estimée à 13 millions d'euros à des groupes terroristes dont Daech, pour espérer poursuivre ses activités sur place alors que la Syrie était déjà à feu et à sang.

Face à la justice américaine, Lafarge a été condamné à une amende de 778 millions de dollars en octobre 2022 pour son soutien aux groupes terroristes en Syrie.


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