Dr İbrahim Nâsır : La Türkiye aussi dans le viseur au Soudan

16:503/11/2025, lundi
Aydın Ünal

Dr İbrahim Nâsır, alors jeune lieutenant de la police soudanaise, a obtenu une bourse du YTB pour poursuivre ses études en La Türkiye. Il a soutenu la semaine dernière sa thèse de doctorat en relations internationales à l’Université d’Istanbul. Je lui ai demandé un court entretien sur le Soudan. Voici l’échange : — Cher Professeur, l’opinion publique en La Türkiye et dans le monde commence enfin à s’intéresser de près aux atrocités au Soudan. Les nouvelles qui nous parviennent sont très douloureuses.

Dr İbrahim Nâsır, alors jeune lieutenant de la police soudanaise, a obtenu une bourse du YTB pour poursuivre ses études en La Türkiye. Il a soutenu la semaine dernière sa thèse de doctorat en relations internationales à l’Université d’Istanbul. Je lui ai demandé un court entretien sur le Soudan. Voici l’échange :


— Cher Professeur, l’opinion publique en La Türkiye et dans le monde commence enfin à s’intéresser de près aux atrocités au Soudan. Les nouvelles qui nous parviennent sont très douloureuses. Ce qui nous fait le plus souffrir, c’est de voir un musulman opprimer un autre musulman. Comment est-ce possible ?

— Dr İbrahim Nâsır : "Malheureusement, les affrontements au Soudan sont de nature ethnique. Les tribus vivant sur l’axe qui s’étend de l’ouest du Soudan jusqu’au Tchad, à la Libye, au Niger, à l’Algérie et au Mali, unies par une alliance naturelle, sont attisées en exploitant des différends historiques. Un flux d’armes parvient à ces tribus depuis certains pays. Le Soudan avait déjà été scindé en deux ; aujourd’hui, ils veulent le diviser en trois."

— L’assaillant est musulman, la victime est musulmane. Et la cruauté dépasse ce que l’on voit habituellement en temps de guerre.
— Dr İbrahim Nâsır : "Pour être franc, la sensibilité islamique de ces tribus est un peu différente. Il y a des conditions façonnées par la géographie. L’appartenance tribale passe très largement avant l’appartenance religieuse. 'Tuer' y est perçu comme un acte très banal, parfois même arbitraire. La notion de 'miséricorde' a un sens différent dans ces tribus. Bien qu’ils soient musulmans, ils n’ont pas abandonné certaines habitudes de l’époque de l’ignorance. Par exemple, le régime de l’esclavage subsiste encore dans ces tribus ; il arrive qu’on tue sans scrupules les enfants nés de femmes esclaves lorsqu’il s’agit de garçons, pour éviter qu’ils ne perpétuent la lignée."

Un conflit attisé de l’extérieur


— Les Émirats arabes unis sont pointés du doigt comme responsables de ces atrocités au Soudan. S’agit-il seulement des EAU ?
— Dr İbrahim Nâsır : "Les Émirats arabes unis ne sont ici qu’une marionnette. Les véritables instigateurs de ces atrocités sont principalement Israël et les États-Unis. Des experts venus d’Ukraine, et même des mercenaires de Colombie, soutiennent ces exactions sur le terrain. Les armes transitent par les EAU. Le soutien des EAU aux séparatistes est documenté et rapporté avec des preuves."

— Que recherchent-ils au Soudan ? Est-ce uniquement une question d’or ?
— Dr İbrahim Nâsır : "Le Soudan détient 80 % des réserves d’or de la région. Certes, ces réserves éveillent les convoitises, mais ce n’est pas la seule raison. Ils veulent s’emparer des terres agricoles fertiles et des minerais du Darfour, ainsi que des ports stratégiques du Soudan. La raison fondamentale de ces atrocités, c’est la sécurité d’Israël. En divisant et en affaiblissant le Soudan, Israël veut faire de la mer Rouge une zone sûre pour lui. Un point est important : le Soudan a toujours soutenu la cause palestinienne. Tandis qu’Israël cherche à briser le soutien du Soudan à la Palestine, les pays arabes, en premier lieu les EAU et l’Arabie saoudite, tentent de qualifier la sensibilité religieuse au Soudan de 'mouvement des Frères musulmans' pour la neutraliser. L’affirmation selon laquelle 'le Soudan a approuvé les Accords d’Abraham' est fausse ; le chef de milice Hımidti, qui commet aujourd’hui des massacres inhumains au Darfour, avait été, à l’époque, associé à la direction du Soudan par une décision politique très erronée. Ce n’est pas le Soudan qui voyait d’un bon œil les Accords d’Abraham, mais Hımidti, celui-là même qui répand aujourd’hui le sang sans pitié. Nous avons donc clairement une alliance Israël–pays arabes–milices séparatistes."

Que doit faire La Türkiye ?


— Que devrait faire La Türkiye dans cette crise ? Qu’attendez-vous d’elle ?
— Dr İbrahim Nâsır : "La crise au Soudan concerne de très près La Türkiye. Si le Soudan est divisé, tout ce que La Türkiye a accompli jusqu’à présent pour la Libye et la Somalie sera réduit à néant ; sa souveraineté en Méditerranée sera menacée. Les portes de l’Afrique se fermeront à La Türkiye, pas seulement celles du Soudan et de la mer Rouge. En d’autres termes, dans ces affrontements, La Türkiye est autant visée que le Soudan. Il y a au Soudan de nombreux jeunes qui, comme moi, ont étudié en La Türkiye. Pour le renforcement et la stabilisation du Soudan, et surtout pour sortir de la crise, il faut soutenir et organiser ces jeunes formés et compétents. Mais notre attente prioritaire vis-à-vis de La Türkiye, c’est un appui en armement. Les milices séparatistes accèdent, via les EAU, à toutes sortes d’armes létales. Elles disposent même d’armes chinoises obtenues par l’intermédiaire des EAU. L’armée soudanaise, elle, est maintenue sous embargo. La Türkiye doit soutenir l’armée soudanaise, non seulement pour ses frères musulmans au Soudan, mais d’abord dans son propre intérêt. Si le Soudan perd cette guerre, croyez-moi, La Türkiye perdra aussi."
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