Un acte d’accusation "vide"… vraiment ?

09:3914/11/2025, vendredi
MAJ: 14/11/2025, vendredi
Ersin Çelik

L’acte d’accusation visant le maire d’Istanbul Ekrem Imamoglu a été rendu public. À peine diffusé, plusieurs responsables du CHP ont réagi sur les réseaux sociaux en répétant la même formule : "Cet acte d’accusation est vide. Il n’en sortira rien." Pourtant, avant même de discuter des accusations avancées par le parquet, il est utile de regarder la nature du dossier. Nous parlons d’un ensemble de 3 671 pages retraçant une période de dix ans : témoignages, aveux, correspondances, relevés bancaires,

L’acte d’accusation visant
le maire d’Istanbul Ekrem Imamoglu
a été rendu public. À peine diffusé, plusieurs responsables du CHP ont réagi sur les réseaux sociaux en répétant la même formule :
"Cet acte d’accusation est vide. Il n’en sortira rien."

Pourtant, avant même de discuter des accusations avancées par le parquet, il est utile de regarder la nature du dossier. Nous parlons d’un ensemble de 3 671 pages retraçant une période de dix ans : témoignages, aveux, correspondances, relevés bancaires, rapports financiers lourds et volumineux. Ouvrir un tel dossier prend du temps ; évaluer la chaîne de preuves, les flux financiers et la structure supposée qu’il décrit demande encore davantage.


Dès lors, affirmer d’emblée que l’acte est
"vide
" pose une question simple :
qui peut juger de la solidité ou de la vacuité d’un tel ensemble sans l’avoir véritablement analysé?

Peut-on balayer un dossier sans l’examiner ?


Dans de nombreux pays, les juristes utilisent désormais des outils d’analyse numérique pour traiter les dossiers complexes. Pourtant, même ces technologies mettent des heures à charger et analyser des documents de cette ampleur.


Le public le voit bien : la réaction consistant à qualifier immédiatement l’acte d’accusation de
"sans valeur"
ressemble moins à une lecture rigoureuse qu’à une stratégie politique réflexe.

Des éléments qui interrogent


Voici quelques éléments mis en avant dans un acte d’accusation présenté comme
"vide"
:

  • Détections de flux financiers par MASAK
  • Rapport de l’inspection administrative
  • Échanges Signal considérés comme des aveux potentiels
  • Confessions sur des transferts d’argent liquide
  • Appels d’offres faussés
  • Préjudice public estimé à 160 milliards TL + 24 millions de dollars
  • Revenus supposés d’une organisation approchant 40 milliards TL
  • Schémas du système financier mis en place via la municipalité
  • Témoignages concordants provenant de niveaux hiérarchiques inférieurs

Face à ces éléments, peut-on réellement affirmer que le dossier
"ne contient rien" ?

Cette tentative de décrédibilisation ne reflète-t-elle pas davantage une réaction politique précipitée qu’un examen juridique approfondi ?


Une occasion manquée


Quelques jours avant la transmission de l’acte d’accusation au tribunal, la presse en avait déjà annoncé la finalisation. Le CHP aurait pu constituer une commission d’experts, analyser le dossier puis publier une réponse structurée. Cela l’aurait placé en position de force.


Cela n’a pourtant pas été fait. Au lieu d’étayer une argumentation juridique solide, une stratégie de discrédit immédiat a été préférée. Pourquoi cette précipitation ?


Un dossier vraiment "vide" serait facile à réfuter


Du point de vue de la communication, cette réaction révèle une crainte : affaiblir l’impact du dossier, contenir l’inquiétude interne, et envoyer au public un message clair :
"N’y prêtez pas attention."

Mais cette posture trahit aussi une autre réalité :
si le dossier était réellement vide, il suffirait d’une analyse juridique sérieuse pour le démontrer.
Un acte d’accusation sans preuves se désagrège de lui-même. Il n’a pas besoin d’être rejeté d’emblée.

L’acte est-il solide ou non ? Ce sera au tribunal de le déterminer.

Ce qui est sûr, en revanche, c’est que la justice se fonde sur des preuves, des documents, des schémas, des aveux et des flux financiers — et non sur des réactions politiques spontanées.

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