Je vais vous raconter ce que nous avons vécu la nuit précédente, mais je précise d’emblée que nous ne savons pas encore ce que les heures suivant la rédaction de ces lignes (18h10) nous réserveront. Nous nous sommes beaucoup rapprochés de Gaza et, pour cette raison, nous avons ralenti.
Nous naviguons dans des eaux où Israël est déjà intervenu contre d’autres navires ; à l’heure actuelle, Gaza se trouve à 85 milles marins de nous. Si nous continuions sans relâche, nous pourrions y être en l’espace de quelques heures. C’est pourquoi la nuit du 1er au 2 octobre sera la période la plus critique pour la Flottille Sumud. Tout peut arriver à tout moment.
Soyons clairs : Israël est plus acculé que jamais. Cette mission civile en mer s’est presque "ligotée" elle‑même. Le convoi, qui navigue depuis plus d’un mois, a d’abord été menacé d’une intervention violente et d’arrestations longues pour ses activistes. Les menaces n’ont pas cessé ; en Tunisie, ils ont touché des embarcations. Quand la flottille a continué, ils ont ensuite ciblé dix bateaux au large de l’île de Crète, dans la zone de recherche et de sauvetage grecque. Ils ont fait exploser des charges au‑dessus de nos têtes. Ces sabotages ont retardé la Flottille de trois jours, mais la plus large mission civile de l’histoire a repris sa route. Cela fait maintenant cinq jours que nous sommes en haute mer et, après la Crète, la prochaine terre que nous atteindrons sera Gaza, vers laquelle nous avançons millimètre par millimètre.
Israël a tenté par tous les moyens d’arrêter d’abord cette flottille depuis la terre. Il a cru que ses menaces et ses campagnes de discrédit provoqueraient la panique ; ce ne fut pas le cas. Après les sabotages à la bombe, ils espéraient que les activistes fuiraient ; pas un seul ne descendit des bateaux. Enfin, l’option italienne a été activée : le gouvernement Meloni a lancé une opération de retrait des citoyens italiens. Mais les activistes italiens — parmi lesquels figurent de nombreux capitaines — ont résisté fermement et sont restés à bord. Sans eux, cette Flottille n’aurait pas pu continuer avec autant de force.
La nuit dernière, pour la première fois, Israël a attaqué la Flottille depuis la mer. Il s’est manifesté. On savait qu’une frégate se trouvait aux environs de la Crète, mais elle n’avait jamais été visible auparavant. Vers 03h30, alors que nous étions à 150 milles de Gaza, un bateau fantôme est apparu près de notre navire principal, l’Alma. Dans l’obscurité totale de la nuit, cet engin, au pont parfaitement plat, était un véhicule marin sans équipage. Ce fantôme numérique est venu sur l’Alma avec l’intention d’un sabotage informatique. Alors qu’il tournait autour de nous, les téléphones à bord se sont verrouillés, les caméras se sont éteintes. Il s’agissait d’une attaque cyber visant à couper nos communications pour nous laisser seuls et vulnérables au milieu de la mer.
La doctrine militaire israélienne repose sur l’érosion psychologique avant le conflit direct : déstabiliser, semer la panique, et profiter de la confusion pour atteindre ses buts. Nous avons été entraînés pendant des jours à contrer ces méthodes. La première règle de la résistance passive est de ne pas se laisser submerger par le choc. Israël annonce depuis des jours des opérations, mais l’atmosphère à bord demeure calme. Il y a bien sûr des moments d’inquiétude, mais ils sont rapidement remplacés par une froide détermination.
Nous sommes très proches de Gaza et, cette fois, la tâche d’Israël est réellement ardue. Notez que l’État hébreu a organisé trois sabotages contre cette Flottille, à chaque fois en dissimulant son rôle. Bien que les auteurs soient, de fait, connus de beaucoup, on les a toujours désignés officieusement comme des « suspects habituels ». Ils ont menacé en lançant des bombes puis se sont retirés avant l’aube. Pourquoi ? Parce qu’en face d’eux il n’y a pas seulement une flottille civile, pacifique, désarmée, transportant des couches et du lait pour bébés. La Flottille incarne la conscience de 47 pays. Une intervention sanglante contre ce convoi frapperait non seulement des activistes, mais aussi l’opinion publique de ces 47 États. Peut‑on imaginer qu’Israël prenne le risque d’un conflit diplomatique simultané avec des dizaines de pays, des États‑Unis au Royaume‑Uni, du Japon à l’Allemagne, du Brésil à l’Espagne ? C’est pourquoi il préfère les sabotages secrets et les menaces anonymes : la véritable force de cette Flottille n’est pas son chargement, mais l’alliance de conscience mondiale qu’elle représente. À mesure que les heures passent, ce ne sont pas seulement des bateaux qui s’approchent de Gaza, mais l’honneur de 47 nations et le raisonnement diplomatique d’Israël qui se retrouvent soumis à une ultime épreuve. Cette attente silencieuse pourrait être l’avant‑veille de la tempête ; ce qui suivra pourrait être décisif pour Gaza.
Si Israël empêche ou retient la Flottille Sumud par la force, il répéterait l’erreur historique commise en 2010 avec l’attaque contre la Mavi Marmara. Cette fois-là, en foulant au pied le droit international et la conscience humaine, ils ont déclenché un mouvement de contestation mondial et une interrogation accrue sur le blocus de Gaza. Une nouvelle erreur de ce type pourrait transformer cette vague de protestation en un véritable tsunami. Il faut qu’ils sachent une chose avec clarté : toute brutalité exercée contre cette flottille n’engendrera pas la peur durable, mais provoquera l’organisation d’une flottille suivante, plus nombreuse, plus déterminée et dotée de davantage d’embarcations.
Des milliers de personnes dans le monde sont prêtes à s’engager dans cette noble résistance. ONG, réseaux d’activistes et consciences individuelles se préparent sans relâche à lancer de nouvelles missions et à collecter des fonds. Il ne s’agit plus seulement d’un convoi d’aide ; il s’agit d’un blocus moral mis en cause depuis la mer contre les politiques illégales d’Israël. Israël peut arrêter une flottille, mais il ne pourra jamais empêcher la dignité humaine de se lever et de reprendre la mer.
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