Cette fois entendrons-nous, ou est-il déjà trop tard ?

08:2920/08/2025, mercredi
Ersin Çelik

Je suis de près trois initiatives majeures, toutes centrées sur Gaza. La première, je l’avais déjà évoquée dans ma dernière chronique : des dizaines de navires s’apprêtent à appareiller de la Méditerranée vers Gaza. Les préparatifs touchent à leur fin et, à mesure que s’approche la date du départ, les questions pressantes comme les dernières informations se multiplient. Je les partagerai dans ma prochaine chronique. Une éventualité redoutée : l’intervention armée Le second développement est celui

Je suis de près trois initiatives majeures, toutes centrées sur Gaza.

La première, je l’avais déjà évoquée dans ma dernière chronique : des dizaines de navires s’apprêtent à appareiller de la Méditerranée vers Gaza. Les préparatifs touchent à leur fin et, à mesure que s’approche la date du départ, les questions pressantes comme les dernières informations se multiplient. Je les partagerai dans ma prochaine chronique.


Une éventualité redoutée : l’intervention armée


Le second développement est celui du
« Tribunal pour Gaza »
, institué à Londres en octobre dernier et réuni en urgence à Istanbul.

Ce tribunal, de nature civile, a été créé par des juristes, universitaires, intellectuels et défenseurs des droits humains de premier plan. Leur objectif : pallier l’inaction d’instances internationales engluées dans la lourdeur bureaucratique et paralysées par les pressions politiques, comme la Cour pénale internationale ou la Cour internationale de justice. Le premier grand procès s’était tenu en mai dernier à Sarajevo.


Enquêtant sur les crimes de guerre perpétrés par Israël à Gaza, le tribunal rendra son verdict définitif en octobre prochain.


Son président, Richard Falk, ancien rapporteur spécial de l’ONU sur la Palestine, avertit :


Si aucune mesure radicale et décisive n’est entreprise, il sera trop tard pour sauver le peuple de Gaza, victime d’un génocide depuis 22 mois.


Le message du tribunal est clair : seule une intervention armée de l’ONU pourrait arrêter
"la phase la plus meurtrière du génocide"
en cours. Dès lors, discuter d’alternatives ou chercher des compromis est un luxe que l’humanité n’a plus. L’appel ne s’adresse d’ailleurs pas à Israël – qui n’a jamais reculé devant les injonctions –, mais bien aux institutions et États qui devraient l’arrêter. Ce cri d’alarme est sans doute la dernière chance donnée à l’humanité.

Falk rappelait que l’idée d’une intervention armée avait d’abord été évoquée à l’ONU par le président Erdoğan l’année dernière. Depuis, le discours des capitales occidentales a évolué : l’Europe, notamment, adopte un ton bien plus critique vis-à-vis de Tel-Aviv. Pour plusieurs juristes, si la question de l’intervention était placée dès à présent sur la table, avant l’Assemblée générale de septembre, elle pourrait contraindre Israël à reculer. Leur analyse est tranchante :
"Ouvrir le débat sur un usage préventif de la force, sur une base légale et sans risque de veto, exercerait une pression inédite sur Israël et ses soutiens."

Une fatwa décisive réveillera-t-elle les musulmans ?


Troisième développement : l’initiative annoncée par le cheikh Hayrettin Karaman.
L’Union internationale des savants musulmans se réunira à Istanbul.
Leur rassemblement ne se limitera pas à des débats théoriques : un grand nombre de dignitaires prieront ensemble à Eyüp Sultan le vendredi 22 août, puis se retireront en séminaire pendant huit jours afin d’émettre des décisions concrètes concernant Gaza et l’ensemble de la communauté musulmane.

Sous l’impulsion du président de l’Union, le professeur Ali Muhyiddin al-Qaradaghi, les savants doivent proposer des objectifs à la fois intellectuels, spirituels et pratiques.

Il faut rappeler que l’organisation avait déjà publié plusieurs fatwas depuis le début du génocide. En avril, son comité avait décrété que le jihad armé contre Israël était une obligation religieuse pour tous les musulmans. Auparavant, un appel au boycott des États et marques soutenant Israël avait été émis. Mais ces décisions, bien que fortes, sont restées sans écho concret. Pourquoi ? Certainement pas par faute exclusive des savants. Retards, manque de coordination, faiblesse de la communication : tout cela peut être avancé. Mais chaque fatwa, validée à l’unanimité par un collège de 15 érudits, engage l’ensemble des musulmans. La vraie question est ailleurs :
pourquoi les fidèles n’appliquent-ils pas ces verdicts religieux ?

Le séminaire d’Istanbul pourrait déboucher sur des fatwas plus claires, plus radicales, peut-être plus adaptées à la gravité de la situation. Après 22 mois de massacres, il ne s’agit plus seulement de prononcer un avis religieux, mais de réveiller une conscience endormie. Mais une fatwa, si tranchante soit-elle, ne vaut que si elle est portée par une communauté décidée à agir. Sinon, elle reste une déclaration sur papier.


Ainsi, ce qui se jouera à Istanbul, ce n’est pas la parole des savants – qui auront rempli leur devoir –, mais la sincérité et le courage des musulmans eux-mêmes. La vraie question est donc : cette fois-ci, entendrons-nous l’appel ?


Le compte à rebours de l’humanité


Les navires qui appareilleront de Méditerranée, l’appel urgent des juristes internationaux à une intervention armée et la fatwa attendue des savants musulmans d’Istanbul…
Tout cela n’est-il pas le cri de l’humanité et de l’Oumma, une fois encore contrainte de se tourner vers sa propre conscience, faute d’avoir pu compter sur les puissants ?
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