Gaza et El-Fashir : la connexion oubliée entre les Émirats arabes unis et Israël

15:453/11/2025, lundi
Yasin Aktay

Les massacres, viols, pillages et déplacements forcés qui ravagent le Soudan depuis deux ans et demi ont brutalement refait surface dans l’actualité mondiale, après la chute d’El-Fashir entre les mains des milices des Forces de soutien rapide (FSR) dirigées par Mohammed Hamdan Daglo, dit Hemedti, et soutenues par les Émirats arabes unis (EAU). Ce n’est pas la première fois que les FSR défient le gouvernement soudanais : elles avaient déjà conquis Khartoum, Omdurman et la région d’Al-Jazira, y perpétrant

Les massacres, viols, pillages et déplacements forcés qui ravagent le Soudan depuis deux ans et demi ont brutalement refait surface dans l’actualité mondiale, après la chute d’El-Fashir entre les mains des milices des Forces de soutien rapide (FSR) dirigées par Mohammed Hamdan Daglo, dit Hemedti, et soutenues par les Émirats arabes unis (EAU).


Ce n’est pas la première fois que les FSR défient le gouvernement soudanais : elles avaient déjà conquis Khartoum, Omdurman et la région d’Al-Jazira, y perpétrant des massacres et crimes contre l’humanité. Pendant deux ans, Hemedti a exercé un contrôle précaire sur la capitale, sans jamais établir de véritable gouvernance — ni culture politique, ni projet, ni volonté de bâtir. Son seul objectif : piller et détruire.


Un conflit inégal présenté comme une guerre civile


Qualifier la tragédie soudanaise de simple
"guerre civile"
relève d’une profonde erreur d’analyse. Il ne s’agit pas d’un affrontement entre deux forces équivalentes. D’un côté, un État légitime, appuyé par son peuple et ses institutions, engagé dans une transition politique difficile. De l’autre, un chef de guerre s’appuyant sur des mercenaires venus du Tchad, de Libye et d’autres pays africains — souvent issus de réseaux tribaux — qui sème la terreur pour des raisons purement économiques.

Hemedti, acteur central des crimes de guerre du Darfour jadis imputés à Omar el-Béchir, n’a jamais cessé de poursuivre cette logique du chaos.


Les FSR, motivées uniquement par le butin, n’ont aucun projet de reconstruction. En un an, elles ont détruit tout sur leur passage : pillages, meurtres arbitraires, viols massifs. Face à elles, l’armée soudanaise a regagné du terrain, libérant Omdurman, Al-Jazira et Khartoum ces derniers mois.


Battu dans la capitale, Hemedti a tenté de se replier vers le Darfour. Ses troupes, épuisées et démotivées, se sont effondrées… jusqu’à ce qu’une main étrangère leur désigne un nouvel objectif : El-Fashir.


Le rôle décisif des Émirats arabes unis


Après 500 jours de siège et plus de 300 attaques, El-Fashir est tombée en mai 2024. Les milices de Hemedti ont alors bloqué l’aide humanitaire, utilisant la faim comme arme de guerre. Le résultat : famine, massacres, exterminations collectives.


Le parrain de cette offensive est désormais connu de tous : les Émirats arabes unis.


El-Fashir n’est pas un lieu anodin. Située à la frontière du Tchad et de la Libye, elle contrôle un corridor logistique majeur et abrite un aéroport militaire stratégique. En aidant Hemedti à s’en emparer,
Abou Dabi cherche à reproduire au Soudan le modèle libyen : une partition de facto lui garantissant un espace d’influence autonome.

Cette politique de déstabilisation n’a rien de nouveau. Les EAU apparaissent désormais comme un facteur constant de discorde dans le monde musulman : partout où éclate une crise, leur ombre n’est jamais loin.


Comme le soulignait l’homme politique égyptien Ayman Nour dans une lettre ouverte :
"Que veut donc la 'sœur' Émiratie au Soudan ? Quel intérêt direct ou indirect trouve-t-elle à soutenir les Janjawids, coupables de tous les crimes imaginables ? Quels gains peuvent justifier tant de sang, tant d’humiliations, tant de destructions ?"

Les réponses à ces questions sont connues. Abou Dabi convoite les ressources aurifères du Soudan et cherche à contrôler les routes commerciales africaines. En soutenant Hemedti, un criminel de guerre notoire, elle s’associe pleinement à ses crimes.

Pire : les Émirats ont orchestré une véritable propagande numérique pour masquer les atrocités, finançant des campagnes massives de désinformation sur les réseaux sociaux.


Une politique parallèle à celle d’Israël


Cette guerre interne au monde musulman rappelle tragiquement Gaza : les deux tragédies illustrent la même impunité.

Beaucoup résument la situation d’une phrase douloureuse : "Ici, ce sont des musulmans qui massacrent d’autres musulmans." Pourtant, cette lecture omet un détail essentiel : dans chaque dossier régional, les Émirats arabes unis agissent de concert avec Israël. Leur politique d’expansion et de division épouse parfaitement la stratégie israélienne au Moyen-Orient.


Depuis la chute d’Omar el-Béchir, Israël a gagné une influence inédite au Soudan. Avec l’aide des Émirats, la junte de transition s’est précipitée dans le processus de normalisation avec Tel-Aviv, en échange de la levée des sanctions américaines. Aujourd’hui, la prise d’El-Fashir offre un nouveau tremplin stratégique vers le Nil.


Reste à savoir comment réagiront La Türkiye, l’Égypte et l’Arabie saoudite face à cette reconfiguration régionale imposée par l’axe EAU–Israël.
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