Budget de la France: une "contribution exceptionnelle" demandée aux grandes entreprises et aux ménages les plus aisés

10:5111/10/2024, Cuma
AFP
Un document du budget 2025 de la France avant sa présentation lors de la réunion hebdomadaire du cabinet au palais présidentiel de l'Élysée, le 10 octobre 2024, à Paris.
Crédit Photo : LUDOVIC MARIN / AFP
Un document du budget 2025 de la France avant sa présentation lors de la réunion hebdomadaire du cabinet au palais présidentiel de l'Élysée, le 10 octobre 2024, à Paris.

Le gouvernement français a dévoilé jeudi son projet de budget pour 2025, sous forte pression pour trouver des économies en raison d'une dette "colossale" qui inquiète l'Union européenne, avec notamment des contributions "exceptionnelles" demandées aux ménages les plus aisés et aux grandes entreprises.

Le gouvernement du Premier ministre Michel Barnier (droite) s'est fixé pour objectif de réduire le déficit de 60 milliards d'euros afin d'éviter que celui-ci ne dépasse les 6% du PIB, une dérive qui vaut à la France de faire l'objet d'une procédure de Bruxelles pour déficit excessif.


Le gouvernement va soumettre environ 400 grandes entreprises, pendant deux ans, à une
"contribution exceptionnelle"
sur leurs bénéfices réalisés en France en 2024 et 2025 afin de participer au redressement des finances publiques.

Cette mesure, qui concerne les entreprises réalisant un chiffre d'affaires d'au moins 1 milliard d'euros, doit rapporter 8 milliards d'euros en 2025 et 4 milliards en 2026.


Le gouvernement prévoit aussi d'instaurer durant trois ans une
"contribution temporaire et exceptionnelle"
visant les ménages les plus aisés qui rapporterait 2 milliards d'euros en 2025.

Ce mécanisme concerne ceux qui sont déjà soumis à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (soit un revenu de référence de 250.000 euros pour un célibataire et 500.000 euros pour un couple).


Préserver l'attractivité


Par ailleurs, le gouvernement prévoit d'instaurer une
"taxe exceptionnelle"
sur les grandes entreprises de fret maritime, qui doit rapporter 500 millions d'euros l'an prochain, et ne devrait toucher que le principal armateur français CMA-CGM.

Dans un pays qui en est le champion européen, la dépense publique continuera à augmenter, mais moins fortement. Quelque 2.200 postes de fonctionnaires seront supprimés, notamment dans l'éducation nationale. Et le budget du ministère de la Justice s'établira à 10,24 milliards d'euros, soit près de 500 millions d'euros de moins que ce qui était prévu.


La France a vu sa dette gonfler à 112% du PIB en juin, soit le niveau d'endettement le plus élevé de l'UE devant la Grèce et l'Italie.
Son taux d'emprunt à dix ans a dépassé fin septembre celui de l'Espagne sur le marché de la dette, une première depuis près de 18 ans.

La marge de manœuvre de Michel Barnier est toutefois étroite en l'absence de majorité à l'Assemblée nationale. En outre, plusieurs ministres et députés ont fait part cette semaine de leur préoccupation quant aux efforts attendus.


"Je veux que cet effort soit juste et qu'il soit équilibré"
, a affirmé jeudi M. Barnier, ajoutant que
"l'attractivité ou la crédibilité de la signature française doit être préservée".

Paris se sait attendu par ses voisins européens, et a dépêché lundi son ministre de l'Economie Antoine Armand à Luxembourg pour tenter de convaincre ses homologues de l'UE de son sérieux budgétaire.


Risque de déstabilisation


M. Barnier a toutefois prévenu que la France n'atteindrait pas le plafond de déficit de 3% en vigueur au sein de la zone euro avant 2029, soit deux ans plus tard que l'échéance fixée par le précédent gouvernement.

Pour le budget 2025, il a estimé que la réduction des dépenses,
"premier remède"
selon lui, devrait permettre d'économiser 40 milliards d'euros.

Les législatives anticipées convoquées par le président Emmanuel Macron après l'échec cuisant de son parti aux élections européennes en juin ont débouché sur un hémicycle fragmenté en trois blocs.


Michel Barnier, qui a composé un gouvernement essentiellement issu de la droite et du centre-droit, devra composer avec l'opposition frontale de la gauche, qui a tenté en vain mardi de le faire tomber avec une motion de censure.

Le projet de budget est jugé
"d'austérité"
par la gauche mais manquant de
"rupture"
pour l'extrême droite.

Le leader de La France insoumise (gauche radicale), Jean-Luc Mélenchon, a qualifié de
"calamité"
ce projet de budget, déplorant
"les 4.000 postes en moins dans l'Education". "Après avoir propagé la misère, voici l'organisation de l'ignorance"
, a-t-il ajouté sur X.


Le député du Rassemblement national (RN, extrême-droite) Jean-Philippe Tanguy, estime, de son côté, ne
"pas voir de rupture avec la mauvaise gestion des 50 dernières années". 

Le prédécesseur de M. Barnier, Gabriel Attal, a dit mercredi redouter
"trop d'impôts"
et
"pas assez de réformes", "avec le risque de déstabiliser nos industries et la classe moyenne qui travaille".

Dans ce contexte, nul n'imagine que le gouvernement pourra s'exonérer de faire usage de l'article 49.3 de la constitution, qui permet de faire adopter un texte sans vote.


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