Le Pacte vert, grand oeuvre inachevé d'Ursula von der Leyen

12:1320/02/2024, mardi
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La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, lors d'une conférence de presse à Berlin, en Allemagne, le 19 février 2024.
Crédit Photo : John MACDOUGALL / AFP
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, lors d'une conférence de presse à Berlin, en Allemagne, le 19 février 2024.

Projet fédérateur devenu épouvantail politique: le "Pacte vert" initié par Ursula von der Leyen a marqué son mandat, avec d'ambitieuses réformes adoptées dans les transports et l'énergie, avant l'enlisement des textes sur l'agriculture face à des résistances croissantes.

Sur quelque 70 réglementations environnementales, une majorité sont adoptées ou en passe de l'être, pour décarboner l'UE et préserver ses écosystèmes. Mais quelques textes-clé sont enlisés voire enterrés.


Transports


Automobile:
décision emblématique, la fin des moteurs thermiques dans les voitures neuves vendues à partir de 2035. D'ambitieux objectifs de déploiement de stations de recharge d'électricité et d'hydrogène sont fixés.

Poids-lourds:
les émissions des camions vendus à partir de 2030 devront être réduites d'au moins 45% par rapport à 2019. Les nouveaux autobus urbains après 2035 seront zéro émission.

Un taux minimum de "carburants durables"
(carburants de synthèse, hydrogène, biocarburants...) sera imposé dès 2025 aux avions au départ de l'UE, augmentant progressivement jusqu'en 2050. Les compagnies aériennes paieront pour les émissions carbone de leurs vols intra-européens.

Les gros navires devront utiliser plus de carburants durables, s'acquitter de quotas carbone, et réduire de 80% leurs émissions d'ici 2050
. A quai, porte-conteneurs et navires de croisière devront utiliser l'alimentation électrique.

Marché du carbone


Le nombre de
quotas carbone
vendus aux industriels pour couvrir leurs émissions diminuera drastiquement pour les obliger à accélérer leur verdissement.

Un
second marché du carbone
s'appliquera au fioul de chauffage et aux carburants routiers à partir de 2027. L'impact pour les ménages sera amorti par un Fonds social pour le climat.

Une
"taxe carbone" aux frontières
s'appliquera progressivement à partir de 2026 à certaines importations (acier, aluminium, ciment, engrais, électricité). Les quotas d'émission gratuits alloués aux industriels européens disparaîtront.

Energie, bâtiments


Marché de l'électricité:
pour stabiliser les factures et doper les investissements dans les renouvelables et le nucléaire, l'UE favorisera les contrats de long terme et mécanismes de prix garantis par l'Etat.

Des règles durcies s'appliqueront aux
puits d'hydrocarbures et mines de charbon
pour réduire les émissions de méthane

L'UE devra atteindre 42,5% de renouvelables dans sa consommation d'énergie d'ici 2030, le double d'aujourd'hui, avec des cibles pour les transports, bâtiments, industriels... Les procédures d'autorisation seront simplifiées.

Dès 2030, tous les nouveaux bâtiments seront neutres en carbone.
Les rénovations thermiques de bâtiments existants s'accéléreront: la consommation énergétique du parc résidentiel devra diminuer d'au moins 16% d'ici 2030.

Biodiversité


"Puits de carbone" naturels:
 l'absorption nette de carbone par les forêts et sols (prairies, tourbières...) devra augmenter de 15% d'ici 2030.

Déforestation importée:
dès 2025, l'UE interdira l'importation de produits (cacao, café, soja, huile de palme, bois, viande bovine, caoutchouc) s'ils sont issus de terres déboisées.

Renforcement de l'efficacité du traitement des eaux usées
, en faisant payer les industries polluantes (pharmacie, cosmétiques).

Restauration de la nature:
ce texte, édulcoré après une violente bataille politique, impose aux Etats des mesures de restauration sur 20% des terres et espaces marins, avec des objectifs sur les tourbières, cours d'eau, pollinisateurs...

Interdiction de l'exportation de déchets dangereux
ou de déchets plastiques vers des
pays non membres de l'OCDE

Industrie


Compétitivité:
les technologies stratégiques zéro émission (solaire, éolien, batteries, hydrogène, nucléaire...) bénéficieront d'assouplissements réglementaires majeurs pour l'installation d'usines.

L'UE vise, d'ici 2030, d'extraire sur son territoire 10% de sa consommation de matières premières critiques pour la transition énergétique (lithium, cobalt...)

L'UE encadrera strictement la
conception des produits afin qu'ils soient davantage réutilisables, réparables et recyclables
. La destruction des vêtements neufs invendus sera interdite.

Les batteries seront plus facilement remplaçables et recyclables.
L'UE rend obligatoire le même chargeur (USB-C) pour tous les smartphones.

Greenwashing:
les allégations environnementales "génériques" seront interdites sur les étiquettes, les labels "verts" drastiquement encadrés. Un texte en cours de négociations imposerait de prouver toute allégation par des données vérifiables.

Devoir de vigilance: blocage tardif


Ce texte, qui imposerait aux entreprises de corriger les atteintes à l'environnement et aux droits humains dans leurs chaînes de production, est bloqué au niveau des Etats en raison des résistances de Berlin -malgré l'accord conclu avec les eurodéputés.


Emballages, air: phase finale


D'ultimes négociations se poursuivent pour finaliser des textes visant à verdir les emballages (réemploi, recyclage...) et à renforcer les normes sur la qualité de l'air.


Agriculture, chimie: textes enterrés


La Commission a renoncé à présenter une proposition controversée sur l'étiquetage nutritionnel (type Nutriscore).


Un projet sur le bien-être animal, présenté tardivement, est restreint au transport, sans cibler les élevages.


Bruxelles a retiré un texte, bloqué par les eurodéputés, réduisant l'usage des pesticides.


Un texte dérégulant les technologies génomiques ("nouveaux OGM") a été bloqué mi-décembre par les Vingt-Sept.

Le feu vert final des Etats et eurodéputés sur une législation ciblant les émissions des élevages reste incertain, malgré l'accord trouvé fin 2023. 


Bruxelles ne proposera pas de révision du règlement encadrant les substances chimiques dangereuses, pourtant inchangé depuis 2007.


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