Mustapha Karmim: "Bienvenue en Israël, bienvenue en enfer"

David Bizet
18:1124/10/2025, vendredi
Yeni Şafak

Mustapha Karmim, 35 ans, aide-soignant en réanimation médico-chirurgicale en région parisienne, partage son témoignage glaçant après l'interception de la flottille ThousandMadleensToGaza le 8 octobre 2025 dans les eaux internationales. Accompagné de la députée française Alma Dufour et du rappeur belge Youssef Swatt's, il raconte l'abordage nocturne, l'arrestation violente et les humiliations subies au port d'Ashdod. Son récit détaille les méthodes d'intimidation, les insultes en hébreu et en arabe, et cette phrase terrible d'un officier : "Bienvenue en enfer". Un témoignage poignant sur l'action humanitaire et ses conséquences.

"Je milite depuis 2014 après les bombardements qu'il y a eu à Gaza. On cherche à faire plus quand on voit que rien ne bouge"
, confie
Mustapha Karmim
, aide-soignant en région parisienne. Face à l'impuissance, ce professionnel de santé de 35 ans a pris une décision radicale :
"C'est là où j'ai décidé de mettre ma vie en danger pour monter sur un bateau et aller tenter de briser ce blocus."

Un équipage international


La flottille
ThousandMadleensToGaza
réunissait un équipage diversifié et engagé. À bord du voilier se trouvaient la députée française Alma Dufour, le rappeur belge Youssef Swatt's, une artiste suisse, un citoyen belge, deux skippers français et
Mustapha Karmim
en tant que medic du bateau. Leur mission: défier le blocus maritime de Gaza et apporter un soutien humanitaire.

Une traversée suspendue par respect pour le 7 octobre


"La traversée s'est particulièrement bien faite"
, raconte Mustapha. L'équipage avait pris une décision éthique importante:
"On a passé un jour en mer à l'arrêt pour éviter d'arriver le 7 octobre et qu'on prenne ça pour de la provocation et pour aussi respecter leur jour de deuil."
La navigation a repris le 7 octobre au soir, mais la mission humanitaire allait être brutalement interrompue.

Kidnapping nocturne en mode fantôme


Le 8 octobre au petit matin, l'impensable se produit.
"Tout le monde dormait sur mon voilier. J'ai eu à peine le temps de lever les yeux et on voit un bateau venir à l'arrière à toute vitesse, nous foncer dessus tous feux éteints, en mode fantôme"
, relate Mustapha Karmim. L'aide-soignant insiste sur un détail crucial:
"Il n'y a eu aucune communication par radio entre l'entité israélienne et nous."

L'abordage est violent et coordonné.
"Un premier militaire de l'occupation israélienne monte sur le bateau, il monte en gueulant 'Hands up! Hands up!' Donc on est tous là, on exécute, on lève nos mains en l'air."
La première cible du militaire ? Les caméras, qu'il s'empresse de neutraliser. L'équipage est ensuite transféré sur un zodiac
: "Personne n'a pu passer, on a tous été kidnappés."

Arrivée au port d'Ashdod: le comité d'accueil de l'humiliation


Au port d'Ashdod, un dispositif d'intimidation attend les membres de la flottille.
"Le premier pied posé sur le port, là, on avait vla les gens qui nous attendaient. Un comité avec plein, plein, plein de drapeaux israéliens"
, décrit Mustapha Karmim.

La violence psychologique commence immédiatement.
"On avait un agent à gauche, un agent à droite qui nous prend par les bras, qui nous lève les bras si fort vers le haut, comme ça, pour qu'on ait la tête baissée au sol. Et ils nous font marcher, accroupis."

Mustapha tente de garder sa dignité:
"J'essayais des fois de tourner un peu la tête pour observer sur les côtés, et plus j'essayais de regarder sur les côtés, plus ils essayaient de me lever les bras."

Les insultes et l'intimidation systématique


Le témoignage de l'aide-soignant révèle une stratégie d'humiliation délibérée.
"Pendant tout ce cursus, j'entends des insultes en hébreu, j'entends 'Benzona charmouta'. Et j'entendais des insultes en arabe : 'Que Dieu maudisse ton père, fils de pute! Tu vas voir ce qu'on va te faire en prison. On va vous baiser en prison.'"

On va vous b*iser en prison

Les menaces visent à briser moralement les activistes humanitaires avant même leur interrogatoire formel.


Face à un officier accompagné d'un traducteur, Mustapha Karmim subit un interrogatoire orienté.
"Qu'est-ce que t'es venu faire ici? T'es entré illégalement en Israël"
, lui lance l'officier.

La réponse de l'aide-soignant est sans équivoque:
"Je l'ai coupé. Je lui ai dit : 'Écoutez, j'ai jamais voulu venir en Israël, c'est vous qui m'avez kidnappé en eaux internationales. Vous nous avez amené de force ici. Nous, on n'a jamais voulu venir ici. Ce n'était pas notre destination d'arrivée.'"

L'officier répond par un rire méprisant, enchaînant les accusations
: "Vous avez été financés par le Hamas. La Palestine, il en reste plus rien. Pourquoi vous venez ici? Vous venez ici pour faire de la com."

"Bienvenue en enfer": la phrase qui résume tout


C'est alors qu'un officier prononce la phrase qui marquera Mustapha Karmim:
"Bienvenue en Israël. Welcome to Hell. Bienvenue en enfer."

Cette déclaration résume l'expérience vécue par l'équipage de la flottille
ThousandMadleensToGaza
: une interception illégale en eaux internationales, une arrestation violente, des humiliations systématiques et une détention arbitraire.

Un témoignage qui interpelle sur le droit international


Le récit de
Mustapha Karmim
soulève de nombreuses questions juridiques. L'interception d'un navire en eaux internationales, l'absence de communication préalable, l'usage de la force et les traitements humiliants subis par l'équipage interrogent sur le respect du droit international maritime et des conventions sur les droits humains.

La présence d'une députée française et de plusieurs citoyens européens dans l'équipage ajoute une dimension diplomatique à cet incident. L'action de la flottille
ThousandMadleensToGaza
s'inscrit dans la longue tradition des flottilles humanitaires tentant de briser le blocus de Gaza, documenté par de nombreuses organisations internationales.

Au-delà de la violence subie, le témoignage de
Mustapha Karmim
illustre le courage de ceux qui mettent leur vie en danger pour défendre leurs convictions humanitaires. Aide-soignant en réanimation médico-chirurgicale, il a choisi de quitter temporairement son service hospitalier en région parisienne pour participer à cette action risquée.

"J'ai décidé de mettre ma vie en danger"
, dit-il simplement, résumant le prix que certains sont prêts à payer pour attirer l'attention sur le sort des populations civiles de
Gaza
.

Et pour cela, Israël a voulu lui faire vivre un enfer.


A lire également:




#Gaza
#Flottille
#Mustapha Karmim
#ThousandMadleensToGaza
#blocus Gaza
#eaux internationales
#aide-soignant France
#témoignage humanitaire
#interception maritime
#Alma Dufour
#Youssef Swatt's
#port Ashdod
#8 octobre 2025
#activisme Gaza
#Exclusif