Madagascar: le militaire Premier ministre suscite de la méfiance, rencontre cruciale mercredi

16:237/10/2025, Salı
AFP
Des centaines d'étudiants défilent le long d'une artère commerciale pour se rendre à une manifestation réclamant la démission du président Andry Rajoelina, à Antananarivo, le 6 octobre 2025.
Crédit Photo : Luis TATO / AFP
Des centaines d'étudiants défilent le long d'une artère commerciale pour se rendre à une manifestation réclamant la démission du président Andry Rajoelina, à Antananarivo, le 6 octobre 2025.

La nomination à Madagascar d'un militaire comme Premier ministre que le collectif à l'origine des manifestations, commencées il y a treize jours, a qualifiée de "diversion", rencontre peu d'adhésion mardi à Antananarivo, encore tronçonnée par des barrages des forces de sécurité.

Cette île particulièrement pauvre de l'océan Indien, à la longue tradition de gouvernements militaires, connaît depuis la veille son nouveau chef de gouvernement, nommé par le président Andry Rajoelina: le général de l'armée de terre Ruphin Fortunat Dimbisoa Zafisambo.


Enfin, pas toute la "grande île": la plupart des passants mardi dans la capitale malgache ignorent la nouvelle et les quelque 200 manifestants ayant rejoint le lac d'Anosy, malgré la trêve dans les appels à manifester, n'y voyaient pas un gage de changement.

"Le président veut faire passer (le message) que c'est un pouvoir militaire et que les civils n'ont qu'à se tenir à carreau"
, balaie Princia Rakotontraibe, un interne en médecine venu au ministère de la Santé pour dénoncer des tirs de gaz lacrymogène samedi au pied d'une maternité.

S'il n'y avait pas d'appel à manifester du mouvement Gen Z mardi, c'est que le collectif à l'origine de la contestation, accompagné d'une vingtaine d'organisations, a lancé la veille un ultimatum au président.


Celui-ci arrive à expiration mercredi soir, à l'issue d'une rencontre au palais présidentiel
"rassemblant les différentes forces vives de la Nation"
, selon l'invitation du chef de l'Etat.

"Il sera possible de poser directement des questions et d'exprimer librement vos préoccupations au Président",
assure celle-ci.

Le mouvement de contestation a déjà menacé d'une
"grève générale nationale"
et de
"prendre toutes les décisions nécessaires"
si
"aucune décision concrète n'est prise".

"Dissolution du Sénat"


Parmi les revendications écrites ne figurent plus la démission du président Andry Rajoelina.


En plus du respect des libertés individuelles, le mouvement Gen Z réclame des
"excuses publiques du chef de l'Etat"
, la
"refondation de la Haute cour constitutionnelle"
et la
"dissolution totale du Sénat, ou à tout le moins de son président",
Richard Ravalomanana, ex-général de la gendarmerie.

"Changer de président en cours de route ne changera pas les choses"
, estime le même interne en médecine de 26 ans avant la dispersion par des gaz lacrymogènes.

Madagascar a
"déjà connu ça en 1972, en 2002 et même en 2009"
, rappelle-t-il, quand Andry Rajoelina avait été désigné président de transition par les militaires après un soulèvement populaire.

Dans le cas d'une démission ou d'un coup d'Etat,
"l'instabilité et le chaos sont les issues les plus probables",
estime auprès de l'AFP la politologue et docteure en sciences politiques Ketakandriana Rafitoson.

Selon elle, les revendications
"donnent désormais une orientation claire à la suite politique de la crise"
.
"Elles ne se limitent plus à la contestation de l'ordre établi"
, estime-t-elle.

Parmi les revendications du collectif figurent le départ du président du Sénat, surnommé "Général Bômba" pour son recours généreux aux gaz lacrymogène lors de la crise de 2009.

Il
"continue finalement à gérer la gendarmerie même s'il est à la retraite",
décrypte un chercheur en sciences politiques malgache, sous couvert d'anonymat.

"Il a son mot sur tous les postes relatifs à la gendarmerie dans les postes de commandement. Toute la chaîne de commandement passe par ce général",
ajoute-t-il.

"Vous ne parviendrez jamais à affronter les forces de l'ordre",
avait d'ailleurs plastronné Richard Ravalomanana en janvier dans les médias malgaches.

"Certains membres des forces de sécurité sont grassement payés pour réprimer les manifestations"
, complète une troisième chercheuse en sciences politiques sous couvert d'anonymat.

Toutefois la perception de l'armée de terre, dont est issu le nouveau Premier ministre, est différente au sein de la population.
"Ce sont surtout la gendarmerie et la police qui ont joué un rôle central dans la gestion des manifestations. Ça a été amplement dénoncé",
observe Ketakandriana Rafitoson.

Reste que pour Daudet Santatriniaina, qui arbore en dépit de ses 41 ans le chapeau aux couleurs du logo Gen Z à la mode malgache,
"c'est comme d'habitude".

"Je suis déçu par ce choix de Premier ministre, il a été directeur de cabinet de l'ancien"
, souligne l'un des quelques manifestants.

Je n'ai pas confiance dans les militaires.

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