
Abdullahi Ibrahim Danjija burine assidûment la roche blanchâtre avant de fourrer dans un sac les blocs qui se détachent des parois de la mine à ciel ouvert.
En une journée de travail, il remplit trois sacs de 50 kg chacun, ce qui lui rapporte 150.000 nairas (100 dollars), soit deux fois le salaire mensuel minimum au Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique où plus de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté.
Il y a trois ans, le mineur de 31 ans est descendu de Kano, au nord, attiré par les promesses de fortune liées au développement de l'industrie minière du lithium dans l'État de Nasarawa, au centre du pays.
Là, comme dans d'autres États du Nigeria, la perspective de participer à l'explosion de la demande mondiale de lithium, l'un des minerais critiques utilisés dans la fabrication des batteries électriques et des téléphones portables, attise les convoitises.
Mines artisanales
À Gidan Kwano, non loin de l'endroit où Abdullahi s'échine, un autre groupe de travailleurs refuse l'accès à leur mine à l'équipe de l'AFP. Ils sont plusieurs familles, femmes et enfants mis à contribution, à entailler le sous-sol avec des explosifs.
Bien qu'ils soient fiers des résultats de leur site d'extraction, ils n'ont pas de permis minier officiel et évitent de communiquer sur leur mine dans les médias, craignant que d'autres ne cherchent à s'en emparer.
Le long de la route principale de la bourgade de Nasarawa, les maisons vides servant d'entrepôts se succèdent. Là, mineurs et intermédiaires effectuent un premier tri et nettoient la roche afin de préparer des morceaux concentrés en lithium pour leurs clients.
Matthew Danbala, l'un de ces vendeurs, martèle les cailloux un par un, accroupi au sol au milieu d'une dizaine d'enfants qui copient ses gestes.
Entreprises chinoises
La Chine, premier raffineur et consommateur de lithium dans le monde, n'est que le second producteur et doit importer le minerai en quantité.
Régulièrement, il déclare la guerre aux mineurs illégaux et procède à des vagues d'arrestations, sans parvenir à interrompre le flux des candidats à la richesse.
Un protocole d'accord a bien été signé fin 2024 entre Paris et Abuja pour mener des projets miniers, notamment concernant le lithium, mais pour l'heure les investissements étrangers se réduisent à des entreprises chinoises, comme Avatar et Ganfeng qui ont installé des usines locales où elles transforment la roche brute en oxyde de lithium avant de l'envoyer dans les usines chinoises.
Conflits
Outre les risques environnementaux, l'exploitation artisanale du lithium au Nigeria est génératrice de conflits, selon l'analyste Charles Asiegbu.
Juste à côté, des éleveurs peuls font paître leurs vaches et brûlent quelques champs afin de préparer la terre pour la prochaine récolte, sans prêter attention aux détonations régulières qui dynamitent la roche alentour.