Le Forum de la Diplomatie d'Antalya dans le processus d'un commerce mondial en restructuration

18:4413/04/2025, Pazar
MAJ: 16/04/2025, Çarşamba
Ömer Faruk Doğan

La lutte pour des droits de douane supplémentaires, lancée par le Président des États-Unis Donald Trump le 2 avril 2025 et couvrant 185 pays enregistrés à l’ONU, se poursuit pour l’instant dans un champ étroit, sous forme de déclarations réciproques uniquement entre les États-Unis et la Chine. Dernièrement, le vendredi 11 avril, en fin de journée, quelques heures après que la Maison-Blanche ait annoncé une augmentation des droits de douane à 125 % sur les produits chinois, la Chine a à son tour

La lutte pour des droits de douane supplémentaires, lancée par le Président des États-Unis Donald Trump le 2 avril 2025 et couvrant 185 pays enregistrés à l’ONU, se poursuit pour l’instant dans un champ étroit, sous forme de déclarations réciproques uniquement entre les États-Unis et la Chine. Dernièrement, le vendredi 11 avril, en fin de journée, quelques heures après que la Maison-Blanche ait annoncé une augmentation des droits de douane à 125 % sur les produits chinois, la Chine a à son tour annoncé une augmentation des droits de douane à 145 % sur les produits américains. Pékin n’est pas resté en retrait de Washington dans l’annonce des droits de douane supplémentaires. Trump, pour le moment, a annoncé qu’il reportait de 90 jours l’application des droits de douane supplémentaires sur les autres pays hors Chine, transformant ainsi cette lutte en un combat commercial bilatéral et restreint avec la Chine. Même si la situation semble s’être partiellement calmée, en réalité, la tension, l’incertitude et les inconnues qui se sont formées en coulisse du commerce mondial continuent de s’intensifier et augmentent chaque jour leur impact négatif sur le commerce mondial.


Bien que la Chine ait interrompu le chargement de conteneurs à destination des États-Unis à partir du 10 avril 2025, aucun signe ne laisse penser qu’elle renoncera à son leadership dans le commerce mondial. Cela signifie que la Chine s’efforcera d’acheminer les produits et marchandises qu’elle avait préparés pour les États-Unis vers d’autres régions du monde. En d'autres termes, la Chine démontre par des mesures prises de manière calme et sans commentaire, qu’elle fera tous les efforts nécessaires pour que l’application par les États-Unis de droits de douane supplémentaires sur les produits d’origine chinoise ne vienne pas affaiblir sa position de leader dans le commerce mondial, et qu’elle ne renoncera en aucun cas à cette lutte. Il semble qu’elle mettra en œuvre les mesures nécessaires dans le silence, en s’appuyant sur son expérience, son savoir-faire et ses connaissances. Le point le plus important à souligner ici est que l’on prévoit que la Chine cherchera à compenser ses pertes sur le marché américain par une initiative commerciale agressive dans les autres pays du monde.


Il ne fait aucun doute que dans ce processus, la Chine adoptera une approche visant uniquement et exclusivement à compenser ses pertes commerciales, avec une grande détermination, sans prendre en compte aucune estimation de coût, ce que l’on peut déduire de ses pratiques passées. Ce qu’il faut surveiller de plus près, c’est le fait que la Chine, dans l’optique de compenser ses pertes coûte que coûte, se concentrera de manière très agressive sur les marchés autres que celui des États-Unis.


Ce processus se présente comme une approche naturelle et inévitable pour la Chine ; cependant, il convient d’évaluer cette situation avec beaucoup de prudence du point de vue du commerce mondial, notamment pour les pays en développement et en particulier ceux qui basent leur modèle de développement sur l’augmentation des exportations. Cela constitue une situation importante et délicate pour eux.


Dans les pays en développement, la faiblesse de la structure du capital, les progrès encore à faire en matière de technologie et de productivité, ainsi que les avantages naturels, géographiques ou autres, spécifiques à ces pays et qui ont eu un impact positif sur leurs exportations jusqu’à présent, risquent d’être totalement neutralisés par un nouveau processus de concurrence. Ces pays pourraient se retrouver confrontés à une atmosphère où ils ne sont pas en mesure de faire face à cette concurrence. En d'autres termes, cela pourrait signifier une nouvelle période de stagnation et de recul des exportations pour ces pays en développement, les opportunités supplémentaires de marché étant dominées par la Chine, et ce processus pourrait se prolonger jusqu’à la fin de la lutte entre les États-Unis et la Chine sur les droits de douane supplémentaires.


De manière plus précise, on peut également prévoir que les pays membres de l’UE seront les premiers affectés par cette situation, notamment l’économie dominante de l’UE, l’Allemagne, dont la part de marché – principalement dans les produits automobiles et industriels – est déjà difficile à défendre. Cette position pourrait être supplantée par les produits chinois, et certains pays de l’UE, qui cherchent déjà une stabilité politique, pourraient à nouveau se retrouver confrontés à une nouvelle période de lutte économique.


La concurrence et la lutte inévitables auxquelles les pays de l’UE, touchés par l’approche commerciale agressive de la Chine, devront faire face, pourraient avoir un effet domino sur les pays en développement. Ceux-ci pourraient ainsi subir un double impact négatif dans la crise d’exportation à laquelle ils sont susceptibles d’être confrontés.


L’un des premiers points qui vient à l’esprit est que les effets négatifs de la contraction du commerce mondial – déjà ralenti en partie par la pandémie de Covid-19, la guerre Ukraine-Russie et l’occupation brutale de Gaza par Israël – pourraient se faire sentir sur les pays africains, les exposant à de nouvelles crises économiques. En particulier, les pays du Golfe, au niveau de vie élevé mais à faible population, et qui ne peuvent consommer ce qu’ils produisent, semblent déjà opter pour une stratégie consistant à compenser leurs pertes en termes de rentabilité financière en augmentant leurs exportations de pétrole tout en réduisant les prix. Bien que cela puisse sembler un avantage pour les pays ayant besoin d’énergie, cela offrira surtout une opportunité de concurrence supplémentaire à la Chine, dont les besoins énergétiques sont élevés et qui dépend des importations pour y répondre.


Au vu des raisons évoquées ci-dessus, les pays en développement et ceux dont l’économie repose principalement sur les exportations doivent impérativement revoir leur position actuelle et prendre dès à présent des mesures pour se protéger des conséquences négatives que pourrait engendrer la lutte entre les grands acteurs du commerce mondial. Cela pourrait permettre à ces pays innocents de protéger leurs sociétés et leurs économies de l’ouragan économique à venir. De toute évidence, l’Organisation mondiale du commerce, dont la Türkiye est membre, a également pour mission naturelle d’apaiser la situation et de renforcer les initiatives visant à atténuer les effets négatifs à venir. À ce titre, il convient de souligner que la Türkiye est en mesure de jouer un rôle incontournable, son positionnement et sa fiabilité offrant une grande opportunité à cet égard. En effet, le Forum de la Diplomatie d’Antalya – ADF –, organisé du 11 au 13 avril 2025 à Antalya, auquel ont participé notre Président, de nombreux dirigeants mondiaux et des représentants de haut niveau de divers pays, constitue un point de départ important dans ce processus.

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