Israël cherche-t-il à provoquer la Türkiye en Syrie ?

16:385/04/2025, samedi
MAJ: 7/04/2025, lundi
Yasin Aktay

Israël, qui ne se rassasie pas de sang à Gaza, continue de compléter à maintes reprises toutes les composantes d’un génocide en bombardant des hôpitaux, des camps de réfugiés, des ambulances, des stations de traitement des eaux et des boulangeries. En même temps, il poursuit ses massacres en Cisjordanie occupée sans même le prétexte du Hamas, en perpétuant le terrorisme des colons usurpateurs. Après ses attaques systématiques contre le Liban, il semble désormais avoir transformé son agressivité

Israël, qui ne se rassasie pas de sang à Gaza, continue de compléter à maintes reprises toutes les composantes d’un génocide en bombardant des hôpitaux, des camps de réfugiés, des ambulances, des stations de traitement des eaux et des boulangeries. En même temps, il poursuit ses massacres en Cisjordanie occupée sans même le prétexte du Hamas, en perpétuant le terrorisme des colons usurpateurs. Après ses attaques systématiques contre le Liban, il semble désormais avoir transformé son agressivité envers la Syrie, entamée depuis le 8 décembre, en une activité routinière.


Les avions de chasse israéliens ont lancé mercredi soir un bombardement massif et destructeur visant les aéroports situés au centre de la Syrie, ainsi que des centres de recherche dans les régions de Hama et Damas. En parallèle, ils ont mené des opérations terrestres et engagé des affrontements dans les provinces de Deraa et Quneitra. Lors de ces attaques, une grande partie de l’aéroport militaire de Hama ainsi qu’une grande section de l’aéroport T4 à l’est de Homs ont été détruites.


Le fait que le peuple syrien, qui a subi pendant 14 ans sous le régime d’Assad l’une des plus grandes oppressions de l’histoire récente – au point d’en devenir un génocide – soit désormais exposé aux attaques israéliennes juste au moment où il s’est libéré d’Assad, montre que sa souffrance est loin d’être terminée. Mais en ce qui concerne Israël, le timing de cette agressivité révèle combien le récit qu’on nous a vendu jusqu’ici est fabriqué de toutes pièces. Jusqu’à maintenant, le régime d’Assad nous était présenté comme le bastion le plus fort de la ligne de résistance contre le sionisme, pourtant Israël s’en prenait très rarement à la Syrie sous Assad.


Parfois, quelques cibles étaient frappées pour faire semblant d’entretenir une hostilité, mais le régime d’Assad ne répondait jamais, bien entendu. En dehors de cela, leurs relations de voisinage étaient stables. Même lorsque l’Iran considérait la Syrie comme un front de résistance, Israël ne s’en mêlait pas trop. À cette époque, Assad possédait-il une force de défense aérienne capable de dissuader Israël ? Bien sûr que non. Alors pourquoi Israël a-t-il lancé une guerre unilatérale juste au moment où son prétendu pire ennemi venait de tomber, et alors que la nouvelle administration n’avait exprimé ni acte ni intention hostile à son égard ?


Ce seul fait suffit à montrer la relation immorale qu’entretient Israël avec le régime d’Assad. Israël était certain que toutes les armes chimiques ou conventionnelles aux mains d’Assad ne seraient jamais dirigées contre lui. Ces armes étaient destinées à être utilisées contre le peuple syrien lui-même. Elles ne représentaient aucune menace pour Israël. Mais maintenant que ces armes sont passées entre les mains du peuple syrien, Israël commence à ressentir une menace.


Cela prouve à lui seul qu’Israël, en tant que force génocidaire, a été complice de tous les crimes commis par le régime baasiste contre son propre peuple pendant 14 ans, voire même durant les 60 années précédentes. Aujourd’hui, cette même puissance qui peut spontanément se mettre en mouvement pour détruire toute l’infrastructure militaire syrienne n’est pas intervenue alors qu’un million de Syriens périssaient. Les armes qu’Assad utilisait pour massacrer sa population n’ont jamais constitué une menace pour Israël. Ceux qui évaluent le changement de régime en Syrie comme un événement approuvé ou favorable aux intérêts des États-Unis ou d’Israël, comment expliquent-ils cela ?


L’objectif des bombardements israéliens est de continuer à détruire toute l’infrastructure militaire, de désarmer complètement la Syrie et, après avoir perdu le régime Assad qui, en réalité, garantissait la sécurité d’Israël depuis 57 ans, de rendre la Syrie incapable de représenter la moindre menace à l’avenir pour la sécurité israélienne.


Israël poursuit ses bombardements, ses opérations terrestres et ses activités de destruction pour éliminer les armes restantes, même si elles sont anciennes et usées. Il cherche aussi à empêcher la création d’une armée forte dans le nouveau régime, équipée de missiles, d’avions et de systèmes de défense aérienne. Par ces bombardements, Israël déclare qu’il ne permettra à personne d’armer et de renforcer cette nouvelle armée.


Les responsables israéliens ne cachent pas que l’objectif principal de cette déclaration est la Türkiye, comme s’ils cherchaient à la provoquer. En effet, les lieux bombardés correspondent exactement aux zones envisagées pour établir une base militaire conjointe entre la Türkiye et la Syrie. Pourtant, le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, a déclaré qu’il ne souhaitait pas que la Türkiye entre en confrontation avec Israël en Syrie. Il a également ajouté : "Si le gouvernement syrien souhaite parvenir à un certain accord avec Israël, cela les regarde", avant de souligner que les attaques israéliennes affaiblissaient la capacité du nouveau gouvernement syrien à dissuader les menaces posées par l’organisation terroriste DAECH et d’autres groupes.


Cette agression qui vise la nouvelle administration syrienne – laquelle n’a exprimé jusqu’ici aucune intention ni déclaration hostile – alors qu’elle n’a pour agenda que de panser les blessures de 60 ans de souffrance et de reconstruire un pays détruit, prouve qu’Israël est une menace incurable. Il n’est pas nécessaire que quiconque, en particulier la Türkiye, le considère comme un ennemi ; son regard et son approche hostiles feront toujours en sorte qu’il ait en face de lui un ennemi prêt à l’anéantir.


Le fait qu’Israël ne cache même pas que, tout en bombardant la Syrie, il vise en réalité la Türkiye, et qu’il initie et provoque directement cette hostilité envers la Türkiye… Cela relève en fait d’une psychologie dictée par la conscience de sa propre culpabilité. Israël sait que, tôt ou tard, il se retrouvera face à la Türkiye à cause de ses crimes, et il essaie déjà de prendre les devants. Ainsi, il est lui-même la cause de la menace qu’il redoute. Peu importe les précautions qu’il prend, il n’aura d’autre issue que la défaite.

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