
Employé du secteur pétrolier à Bassora, Al-Harith Hassan n'arrive plus depuis plusieurs mois à retirer librement son salaire en dollar de la banque. En Irak, où les autorités luttent contre le marché noir des devises, des restrictions pèsent sur les usages du billet vert.
Un paradoxe pour le pays riche en hydrocarbures, disposant de réserves colossales en devises étrangères dépassant les 100 milliards de dollars. Mais l'émergence d'un marché de change parallèle et le combat des autorités pour renforcer la surveillance bancaire -en adéquation avec les régulations internationales de Washington- ont déstabilisé le quotidien.
Employé dans la logistique sur un champ pétrolier du sud du pays, il gagne environ 2.500 dollars par mois.
Quand on va retirer notre salaire, ils nous en donnent une fraction seulement, par tranche.
Dernièrement, dit-il, la tendance penche de plus en plus vers le versement des salaires en dinars selon le taux officiel.
C'est un problème. Ca signifie que le salaire perd 20% de sa valeur en raison de la différence entre taux de change officiel et officieux.
A partir de janvier, la Banque centrale imposera le dinar -plutôt que le dollar- pour toute transaction commerciale et autres opérations à l'intérieur du pays.
"Souveraineté monétaire"
Si les dépôts en dollars existant peuvent être retirés normalement, promet la Banque centrale, à partir de 2024, tout virement de l'étranger sera encaissé en dinars, au taux de change officiel.
Nous consolidons la souveraineté monétaire. Nous ne pouvons pas accepter les opérations avec deux devises au sein de l'économie nationale.
De même, les Hawala, système de transfert d'argent de gré à gré, sans trace bancaire, ne transfèrent plus de sommes en dollar, se limitant -officiellement- à des virements en dinars selon le taux officiel.
Bagdad et son secteur bancaire ont adopté la plate-forme électronique SWIFT. Objectif: surveiller l'utilisation des dollars et mettre au pas une économie informelle florissante, importateurs et commerçants étant parfois tenté par l'évasion fiscale.
"Commerce illicite"
Fin novembre, le gouvernement annonçait des facilités pour encourager les importateurs de cigarettes, de voitures, d'or et de téléphones portables à obtenir des devises via les canaux officiels.
Les voyageurs Irakiens sont aussi autorisés à retirer des dollars avant leur départ. Là encore, problème: la police a interpellé à l'aéroport plusieurs personnes en possession de dizaines de cartes de débit, utilisées pour retirer à l'étranger -au taux officiel- des milliers de dollars, ensuite revendus au marché noir en Irak.