La France se prépare-t-elle à une guerre ?

09:1521/11/2025, Cuma
MAJ: 20/11/2025, Perşembe
Fatih Karakaya

Lorsque le chef d’État-major des armées, le général Fabien Mandon, affirme que "si notre pays flanche parce qu’il n’est pas prêt à accepter de perdre ses enfants, (…) alors on est en risque", le message est clair : préparer les esprits. Préparer à quoi ? À l’idée d’un sacrifice national présenté comme inévitable face à une menace russe constamment brandie. Quelques jours plus tard, le gouvernement publie un guide de "résilience" destiné à la population. À première vue, un simple manuel de prévention.

Lorsque le chef d’État-major des armées, le général Fabien Mandon, affirme que "si notre pays flanche parce qu’il n’est pas prêt à accepter de perdre ses enfants, (…) alors on est en risque", le message est clair : préparer les esprits. Préparer à quoi ? À l’idée d’un sacrifice national présenté comme inévitable face à une menace russe constamment brandie.


Quelques jours plus tard, le gouvernement publie un guide de
"résilience"
destiné à la population. À première vue, un simple manuel de prévention. Mais sa structure, ses injonctions, et son ton invitent à s’interroger :
assiste-t-on à une préparation mentale du pays à un conflit majeur ?

Un guide civil qui ressemble à un manuel de mobilisation


Ce guide officiel explique comment tenir
trois jours en autonomie
, conserver eau et nourriture, faire face aux coupures d’électricité, aux pannes de réseaux, aux ruptures logistiques, gérer un kit d’urgence, réagir en cas d’attaque, de cyberattaque, ou même de guerre. Il rappelle le fonctionnement des sirènes, détaille les comportements à adopter face aux risques industriels, sanitaires ou terroristes, et se conclut par un appel à
"s’engager"
dans l’armée, la réserve, la police ou la sécurité civile.

Pris séparément, ces conseils relèvent de la prévention. Ensemble, ils dessinent tout autre chose :
une population invitée à se préparer, à se tenir prête, comme si l’hypothèse d’un choc majeur devait faire partie du quotidien.

Une rhétorique guerrière qui n'est pas unanimement partagée


Plusieurs voix politiques s'opposent ouvertement à cette dramatisation.
Ségolène Royal,
notamment, rappelle que la France n’a ni vocation ni volonté de
"sacrifier ses enfants"
pour des stratégies qui ne lui appartiennent pas. Elle cite Machiavel pour dénoncer la tentation, toujours dangereuse, d’inventer un ennemi pour maintenir le peuple dans la peur.
Une manière de dire que la France n’a pas à suivre aveuglément une logique guerrière importée, au risque de se laisser enfermer dans une spirale qui n’est pas la sienne.

Cette guerre serait-elle même la nôtre ?


Le spectre de l’escalade militaire est brandi comme une évidence. Pourtant, rien ne dit que ce conflit serait celui des Français. La rhétorique actuelle donne le sentiment d’une automatisation géopolitique : alignement sur des choix stratégiques dictés ailleurs, construction d’un récit de menace permanente, valorisation du sacrifice, mise en condition de l’opinion. Tout cela avant même qu’un débat collectif n’ait lieu.


Le danger est là :
normaliser l’idée de la guerre comme horizon
, sans jamais demander à la population si elle en veut.

Un détournement politique des réalités internes ?


Il existe aussi une lecture plus intérieure de ce brusque tournant guerrier. Cette dramatisation détourne l’attention d’une situation nationale fragile :


* une dette publique historique,
* un État affaibli dans ses missions essentielles,
* une crise politique profonde,
* une impopularité qui atteint des sommets.

Dans ce contexte, instaurer un récit de peur extérieure permet de recentrer l’opinion, d’éteindre les contestations, de relativiser les critiques, et de transformer les angoisses sociales en anxiété géopolitique. Une stratégie vieille comme le pouvoir.


Prévenir les risques, oui. Préparer les esprits à la guerre, non.


Informer sur les catastrophes, les crises et les cyberattaques est une nécessité. Faire glisser insensiblement le pays vers un imaginaire de confrontation, beaucoup moins.


Alors, la France se prépare-t-elle vraiment à une guerre ? Ou assiste-t-on à la construction d’un récit anxiogène destiné à justifier l’impensable, détourner l’attention et ressouder un pouvoir fragilisé ?


L’Histoire l’a montré : on ne joue pas impunément avec la peur. Et la France mérite mieux qu’une dramaturgie guerrière comme stratégie politique.
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