Barguti, l’Aksa et l’humiliation de l’occupant

08:4020/08/2025, mercredi
Yasin Aktay

Il y a quelques jours, la célèbre sénatrice républicaine américaine Nancy Graham a opposé un argument pour le moins cynique aux accusations de génocide visant Israël. Selon elle, si Israël voulait vraiment commettre un génocide, il en aurait les armes technologiques et la capacité militaire. Or, puisqu’il n’a pas exterminé d’un seul coup l’ensemble des Palestiniens, cela prouverait qu’il n’a ni l’intention ni la pratique du génocide. Autrement dit, pour Graham, la seule preuve recevable serait l’anéantissement

Il y a quelques jours, la célèbre sénatrice républicaine américaine Nancy Graham a opposé un argument pour le moins cynique aux accusations de génocide visant Israël. Selon elle, si Israël voulait vraiment commettre un génocide, il en aurait les armes technologiques et la capacité militaire. Or, puisqu’il n’a pas exterminé d’un seul coup l’ensemble des Palestiniens, cela prouverait qu’il n’a ni l’intention ni la pratique du génocide.


Autrement dit, pour Graham, la seule preuve recevable serait l’anéantissement complet de tous les Palestiniens, jusqu’au dernier. Un raisonnement qui illustre à quel point Israël bénéficie d’un privilège unique : pour l’accuser de génocide, il faudrait attendre qu’il ait déjà éradiqué deux millions d’êtres humains, moins un.


Dans le même souffle, Graham explique que les actes de Hamas doivent, eux, être jugés à l’aune de leurs intentions. Ainsi, l’attaque du 7 octobre constituerait, selon elle, une tentative de génocide. Israël, parce qu’il aurait
"pu faire bien pire"
, mériterait en somme la gratitude de l’humanité, tandis que Hamas, même pour ce qu’il n’a pas accompli, devrait être puni sans relâche.

L’arrogance des privilèges


Lorsque l’exceptionnalisme et l’impunité colonisent l’esprit, ils produisent ce genre de raisonnements aberrants. Mais ces plaidoyers en disent aussi long sur l’épuisement moral et politique d’un système :
celui d’un pouvoir qui, dans sa morgue, annonce déjà sa propre faillite.

En témoigne la scène surréaliste d’Itamar Ben Gvir, ministre sioniste de la Sécurité intérieure, extrémiste notoire, venant défier Marwan Barguti dans sa cellule de prison. Cet épisode, soigneusement mis en scène devant les caméras, a offert au public la première image depuis des années de l’un des leaders charismatiques de la résistance palestinienne. Amaigri à l’extrême, Barguti apparaissait comme une ombre de lui-même – mais cette apparition était bien plus révélatrice pour l’occupant que pour le prisonnier.


La dignité contre l’humiliation


Car même dans ce théâtre grotesque, Barguti n’a pas offert aux caméras l’image que l’occupant espérait. Sa stature frêle, sa présence silencieuse et digne rappelaient plutôt l’ultime défi de Yahya Sinwar, lançant son bâton contre les drones israéliens au moment de sa mort. Là où l’ennemi voulait humilier,
il n’a fait que renforcer le symbole.

La propagande israélienne, en diffusant les images de Sinwar ou en exhibant Barguti, croyait discréditer la résistance. Elle n’a fait que l’inscrire dans l’histoire comme modèle de dignité et de courage, voué à inspirer des générations.


L’occupant à court de symboles


À force de s’arroger des privilèges, l’État sioniste dilapide son capital symbolique. Face à lui, le Palestinien – qu’il soit de Gaza, de Jérusalem ou de Cisjordanie – refuse de se réduire à une "vie nue", un corps sans droits, réduit à la survie biologique. Même affamé, enfermé, humilié, il reste sujet, acteur, porteur d’une volonté indomptable.


Voilà pourquoi Israël a jugé nécessaire de transformer Barguti en trophée : pour donner en pâture à sa propre opinion publique l’image d’un prisonnier brisé. Mais ce spectacle n’a révélé qu’une chose : l’abîme moral d’une société qui trouve sa jouissance dans la mise en scène de la souffrance.


De l’Aksa à la prison : une même lutte


Quelques jours avant l’anniversaire de l’incendie du minbar de Saladin à la mosquée al-Aqsa (21 août), l’agression contre Barguti ne saurait être vue comme une simple coïncidence. Les deux événements s’inscrivent dans une politique cohérente : effacer les symboles religieux, nationaux et culturels des Palestiniens.


Barguti n’est pas qu’un détenu. Il incarne l’esprit d’une nation refusant la servitude. De même, le minbar n’était pas qu’une chaire de bois : il représentait Jérusalem et l’identité islamique de la ville. Ensemble, ces symboles relient la mémoire, la foi et la lutte de tout un peuple.


L’occupation vise depuis toujours ces marqueurs d’identité : détruire les lieux saints, réduire au silence les leaders, effacer la mémoire collective. Mais en visant ainsi la substance même de la résistance, elle confirme que la lutte n’est pas seulement territoriale : elle est aussi spirituelle, symbolique et existentielle.


Du feu sacré à la promesse de victoire


Ce que l’occupant entendait infliger comme humiliation devient, en réalité, un levier pour raviver la mobilisation. L’anniversaire du minbar incendié rappelle les crimes contre les lieux saints. L’attaque contre Barguti souligne l’importance de la cause des prisonniers, pierre angulaire du combat palestinien. Ensemble, ces épisodes nourrissent un récit commun : peu importe combien de symboles l’ennemi attaque, ils continueront d’alimenter la flamme de la résistance.


Marwan Barguti, bien que membre du Fatah, est reconnu par Hamas lui-même comme une figure nationale incontournable : son nom figure en tête des listes d’échange de prisonniers. Car les divergences politiques ne sauraient effacer l’unité du sang palestinien ni l’indivisibilité du destin partagé.


Et si certains refusent d’admettre cette vérité, elle ne disparaîtra pas pour autant. La promesse divine, déjà réalisée en Afghanistan, au Bangladesh et en Syrie, reste la même : la victoire appartient aux opprimés.
Les Palestiniens vaincront les sionistes. C’est une certitude. C’est une promesse d’Allah.
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