Nicolas Sarkozy assure qu'il n'y pas eu "un centime libyen" dans sa campagne de 2007

10:5710/01/2025, vendredi
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L'ancien président de la République française, Nicolas Sarkozy.
Crédit Photo : PHILIPPE LOPEZ / AFP
L'ancien président de la République française, Nicolas Sarkozy.

"Vous ne trouverez jamais, jamais non pas un euro, mais pas un centime libyen dans ma campagne", a assuré, jeudi, l'ancien président français Nicolas Sarkozy devant le tribunal correctionnel de Paris.

Alors qu'il comparait aux côtés de douze autres accusés, dont trois de ses anciens ministres, l'ancien chef de l'Etat a estimé qu'il n'y avait
"rien"
dans le dossier, pointant
"ceux qui ont fabriqué"
des preuves contre lui, dont notamment la note publiée par Mediapart et attestant d'un financement chiffré à plus de 50 millions d'euros. Et de lancer:

L'argent de la corruption est le grand absent de ce procès et pour une raison simple: il n'y a pas d'argent de la corruption car il n'y a pas eu de corruption du candidat.

Fustigeant le comportement de l'un de ses principaux accusateurs, lui-même poursuivi dans ce dossier mais en fuite, Ziad Takieddine, Nicolas Sarkozy considère qu'il a servi à la justice
"16 versions"
et s'interroge sur les raisons qui pour lesquelles
"cet individu (le) poursuit d'une haine tenace".

Comme je l'ai toujours fait, j'ai toujours assumé mes responsabilités et je compte bien le faire pendant ces quatre mois.

"Je veux deux choses, la vérité et le droit, si ce n'est pas un gros mot le droit"
, a-t-il poursuivi face à la Cour.

Et de conclure:
"Je n'ai aucun compte à régler et certainement pas avec l'institution dont je sais pourtant qu'une partie m'a violemment combattu lorsque j'étais Président".

Naïf ou enthousiaste, je fais confiance.

Pour rappel, la justice française se penche depuis lundi, douze ans après les premières révélations publiées dans la presse, sur l'affaire dite du
"financement libyen"
de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.

La justice doit répondre à une épineuse question: Nicolas Sarkozy a-t-il obtenu ou tenté d'obtenir des fonds provenant du pouvoir libyen pour financer une partie de sa course à l'Elysée?

Le procès, qui doit durer jusqu'au 10 avril, selon le calendrier prévisionnel, va permettre d'établir les éventuelles responsabilités et implications dans cette affaire qui occupe la scène médiatique depuis de nombreuses années, malgré les farouches dénégations du principal intéressé.


Définitivement condamné par la Cour de cassation depuis le 18 décembre, dans l'affaire
"des écoutes"
, Nicolas Sarkozy doit, donc, affronter une nouvelle tempête judiciaire qui pourrait bien lui coûter cher.

Dans le détail, conformément à l'ordonnance de renvoi émise au terme de l'instruction et révélée par Mediapart, Nicolas Sarkozy est jugé pour des faits de
"corruption passive, association de malfaiteurs, financement illégal de campagne électorale et recel de détournement de fonds publics libyens".

Les juges d'instruction ont, en effet, considéré que
"s'il semble manifeste que l'intégralité des fonds libyens initialement destinés à cette fin n'a pas été mobilisée dans ce but, il ne saurait être contesté que l'information judiciaire a mis en évidence, à la faveur d'investigations rendues particulièrement complexes, des circuits opaques de circulation de fonds libyens ayant abouti, in fine, à des décaisses d'espèces dans une temporalité et une chronologie compatible avec un usage occulte lors de la campagne électorale de 2007".

Parmi les autres accusés, figurent douze personnes, dont les anciens ministres de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant, Brice Hortefeux et Éric Woerth, ainsi que plusieurs intermédiaires.

Parmi les témoignages les plus incriminants rendus publics, figurent celui de Saïf Al-Islam Kadhafi, l'un des fils de l'ancien Guide libyen, qui déclarait dès 2011 qu'il
"faut que Sarkozy rende l'argent qu'il a accepté de la Libye pour financer sa campagne électorale".

Dans un reportage diffusé courant 2018, par la chaîne publique France 2, Moftah Missouri, ancien conseiller et interprète du colonel Kadhafi, assurait lui aussi que l'ex-président libyen
"a aidé Sarkozy"
en lui fournissant
"de l'argent"
pour le financement de sa campagne de 2007.

Son témoignage a ensuite été corroboré dans le même reportage par celui de l'ancien directeur de cabinet du colonel Kadhafi, Béchir Saleh. Filmé en caméra cachée, l'homme a admis que
"Kadhafi avait un budget spécial pour les personnes qu'il souhaite soutenir"
et déclaré
"oui c'est vrai"
concernant les accusations de financement libyen qui visent Nicolas Sarkozy.

Ziad Takieddine, homme d'affaires et ancien homme de main de Kadhafi apparaissait également dans le reportage de France 2. Il y a réitéré les accusations qu'il portait depuis le début de cette affaire révélée par Mediapart.


Devant les enquêteurs, l'homme a reconnu avoir convoyé plusieurs valises d'argent liquide, contenant plusieurs millions d'euros entre 2006 et 2007, au bénéfice de Nicolas Sarkozy et Claude Guéant.

Mais au cours d'une longue interview accordée à Paris Match en 2020, et qui avait fait grand bruit, le franco-libanais avait fini, après des années d'accusations précises sur le dit financement, par opérer un radical changement de version, accusant les magistrats en charge de l'enquête, de l'avoir forcé à mentir.


"Sarkozy n'a pas touché un centime, cash ou pas cash, pour l'élection présidentielle"
, avait-il affirmé dans les colonnes du magazine.

En juin 2021, des perquisitions sont alors menées au domicile de l'ex-conseillère en image officieuse du couple Macron, Michèle Marchand, dite "Mimi Marchand", avant son placement en garde à vue et sa mise en examen pour
"subornation de témoin" et "association de malfaiteurs en vue de commettre une escroquerie en bande organisée".

Placée sous contrôle judiciaire, cette figure de la presse people a été incarcérée dans la foulée pour n'avoir pas respecté les termes de ce contrôle, lui interdisant notamment d'entrer en contact avec certains protagonistes de l'affaire.


L'épouse de l'ancien chef de l'Etat, Carla Bruni Sarkozy est également mise en examen dans cette enquête.


Nicolas Sarkozy avait très rapidement réagi à la rétractation de Ziad Takieddine via son compte Facebook en annonçant avoir mandaté son avocat pour
"déposer une requête en démise en examen et engager une procédure pour dénonciation calomnieuse contre Ziad Takieddine dont les précédentes allégations"
lui ont
"causé un préjudice considérable".

Il se réjouissait que
"la vérité éclate enfin"
et assurait que depuis
"sept ans et demi, l'instruction n'a pas découvert la moindre preuve d'un quelconque financement illicite".

"Jamais il ne m'a remis d'argent, jamais il n'y a eu de financement illégal de ma campagne de 2007"
, avait-il martelé dans son message.

Sarkozy demandait, par ailleurs, à ce que
"les autorités judiciaires fassent la lumière sur les graves accusations portées quant à l'impartialité de certains magistrats".

Mais au terme d'une enquête de près de 2 ans, sur cette étrange rétractation, la justice a établi en avril dernier, que pas moins de 608 000 euros ont été mobilisés pour obtenir la volte-face, par voie de presse, de Ziad Takieddine.

Nicolas Sarkozy encourt jusqu'à dix années de prison et 375 000 euros d'amende.


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