
Recrutement de cadres, taxes, formation de juges, militaires et policiers: le groupe armé M23 consolide son administration parallèle dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), tandis que les négociations de paix tardent à se traduire sur le terrain.
Après s'être emparé des grandes villes de Goma et Bukavu en janvier et février, le M23, groupe armé antigouvernemental soutenu par Kigali, s'est trouvé à la tête d'un vaste territoire où tout est à refaire. La plupart des institutions, comme par exemple les banques, ont été fermées par Kinshasa et de nombreux fonctionnaires ont fui.
Selon des experts contactés par l'AFP, il s'agit pour le mouvement de convaincre les Congolais et la communauté internationale de sa capacité à gouverner. Mais également de peser dans les négociations de paix, initiées par des médiations américaines ainsi que qataries, et qui ont abouti en juin à la signature d'un accord de paix entre la RDC et le Rwanda, sans toutefois empêcher une reprise des combats ces dernières semaines.
Dès les premiers mois, le M23 a nommé des gouverneurs provinciaux, des maires et a commencé à délivrer des documents administratifs.
Depuis août, le M23 multiplie les annonces. Le mouvement a ainsi diffusé une vidéo présentant sa nouvelle police, composée en partie d'anciens fonctionnaires de Kinshasa ralliés de gré ou de force.
Policiers en tenue antiémeute se livrant à une démonstration de force, enquêteurs en combinaison s'entrainant à analyser une scène de crime: le groupe armé insiste sur le professionnalisme de ses nouveaux effectifs, contrastant, selon lui, avec une police congolaise réputée pour sa corruption.
"Soutiens externes"
Des rafles massives ont permis de faire baisser la criminalité, au prix de nombreux abus dénoncés par les organisations internationales.
Le M23 a également présenté 7.000 militaires récemment formés. La valeur de ces troupes, souvent d'ancien militaires congolais capturés au cours des offensives du début de l'année, reste incertaine. Elles pourraient au moins permettre au groupe armé de mieux contrôler ses arrières où des milices pro-kinshasa mènent des actions de guérilla, selon des sources sécuritaires.
Un tel déploiement interroge sur les financements du M23 dans une région dénuée de système bancaire.
Pour pallier à la fermeture des banques, le M23 a créé une régie financière censée centraliser ses revenus. Il a également créé, ou réinstauré, une série de taxes notamment sur les flux commerciaux ainsi que les activités minières.
Une partie de ces impôts sont difficilement soutenables pour les populations éprouvées par le conflit.