Lorsque le président américain Trump a annoncé, depuis Charm el-Cheikh, qu’un accord de cessez-le-feu avait été conclu — lors de réunions auxquelles participait également le chef du MIT, Kalın — ma première réaction a été d’en chercher les détails. Les événements venaient tout juste de se produire et il était difficile d’obtenir des informations. Pourtant, il y avait un accord, même s’il représentait la première phase — échange d’otages et cessez-le-feu. D’après les déclarations des dirigeants,
Lorsque le président américain Trump a annoncé, depuis Charm el-Cheikh, qu’un accord de cessez-le-feu avait été conclu — lors de réunions auxquelles participait également le chef du MIT, Kalın — ma première réaction a été d’en chercher les détails.
Les événements venaient tout juste de se produire et il était difficile d’obtenir des informations. Pourtant, il y avait un accord, même s’il représentait la première phase — échange d’otages et cessez-le-feu. D’après les déclarations des dirigeants, notamment du président Erdoğan, tout le monde semblait satisfait. On remerciait en particulier Türkiye, les États-Unis, le Qatar et l’Égypte.
Le cessez-le-feu était donc acté, mais la question restait : après la libération des otages, et si Israël recommençait les attaques ?
Qui protégerait les Palestiniens de la vindicte israélienne ? J’avais peu d’informations, mais j’avais entendu ceci :
"Türkiye, l’Égypte, le Qatar et les États-Unis sont les pays garants de cet accord. Türkiye prendra place dans la région."
Le président Erdoğan a précisé plus tard dans la journée :
"Nous ferons aussi partie de la force chargée de suivre l’application de l’accord sur le terrain."
C’est une avancée importante. Cette force de mission contribuera à retrouver les disparus, à coordonner l’aide humanitaire et à superviser le cessez-le-feu. J’estime que cette force n’est pas la même que la force internationale de paix d’observation militaire, évoquée antérieurement pour garantir une paix finale — probablement une étape ultérieure si les parties l’acceptent.
Des points d’interrogation demeurent
N’y a-t-il pas de zones d’ombre ? Bien sûr que oui. Comment négociera-t-on la seconde phase — la gouvernance de Gaza, son rattachement à l’Autorité palestinienne, le retrait total d’Israël de toutes les lignes ? Des frictions surgiront-elles ?
Netanyahu, sous la pression des membres ultra-racistes et génocidaires de son cabinet, relancera-t-il les attaques pour préserver son siège ?
N’y aura-t-il pas des provocations visant à briser le cessez-le-feu ? Tout cela est possible.
Mais une chose est claire : en acceptant de négocier avec le Hamas, Tel-Aviv s’est lié. Il se trouve désormais dans l’isolement le plus profond de son histoire. Dans les capitales du monde, il est désormais dénoncé comme auteur de génocide. Comme le dit Süleyman Seyfi Öğün,
"le pilier culturel de la domination mondiale du judaïsme est en train de s’effondrer."
Israël en est conscient. Sa prudence à l’égard d’interventions contre la flotte Sumud et d’autres initiatives en dit long.
Le projet du "Grand Israël" mis au congélateur
Israël avait voulu tirer parti du 7 octobre. Son plan gradué se présentait ainsi : premièrement, occuper/annexer complètement Gaza (et à terme la Cisjordanie) ; éliminer le Hamas ; avec le plan
de Trump, rendre Gaza
" afin d’écarter définitivement la solution à deux États. Ensuite, affaiblir et repousser l’influence iranienne ; établir une zone tampon au sud du Liban et désarmer le Hezbollah ; affaiblir la Syrie, la fragmenter en fédérations et y créer des zones tampons — Druzies au sud, FDS au nord, etc. — tout en maintenant un corridor terrestre et aérien vers l’Iran/Irak (le
). Enfin, concentrer l’hégémonie régionale et obtenir l’adhésion des pays du Golfe, en inscrivant les Accords d’Abraham dans ce nouvel équilibre géopolitique et en bloquant l’ascension d’Ankara en Syrie et dans la région. Ceci était la stratégie sur le papier, nourrie en coulisses par certains décideurs israéliens ultra-nationalistes rêvant d’un Grand Israël.
Pour Tel-Aviv, toutefois, la mer est désormais close. Israël a trébuché dès la première phase (sur le plan palestinien). Ses objectifs vitaux n’ont pas été atteints. Le constat global est le suivant :
1) l’occupation/annexion de Gaza a été empêchée ;
2) les États-Unis ont garanti qu’ils n’approuveraient pas l’annexion de la Cisjordanie ;
3) le projet de « déarabisation » de Gaza a échoué — l’expulsion a été empêchée ;
4) même le Royaume-Uni et la France ont reconnu l’État palestinien ;
5) surtout, un mécanisme de garant est désormais en place : si une force internationale se déploie à Gaza, Israël ne pourra plus y lancer d’attaques unilatérales. Et si Türkiye y est déployée en tant que garant… pour Tel-Aviv, qui lorgnait vers la frontière turque via les FDS, ce serait un retournement — le coup du destin diplomatique.
Le champ syrien ne peut plus porter ce statu quo
Ce tableau peut aussi influer sur les étapes suivantes du plan régional d’Israël (sans prendre en compte la présence des Hashd al-Shaabi en Irak ni les préparatifs contre l’Iran). Vous vous souvenez : lorsque l’État israélien a frappé Damas, l’administration syrienne avait sollicité une aide militaire de Türkiye. Nous avions interprété cela comme
"Ankara pose une option militaire sur la table"
. Après la visite d’Erdoğan aux États-Unis, nous avions prévu des évolutions. Même si Damas souhaitait attendre la fin de l’année prévue par l’accord du 10 mars, le terrain syrien ne peut plus supporter ce statu quo. Les récents affrontements à Alep en sont la preuve.
Le recul territorial d’Israël affaiblit aussi la position des FDS (SDG). Les FDS cherchaient un appui tiers contre Damas et voulaient porter leurs discussions à Paris ; Damas, influencée par Ankara, a refusé. La dynamique de terrain a poussé les Américains — Barrack et le commandant du CENTCOM Cooper — à amener Mazloum Abdi à Damas pour des entretiens.
Dernière chance pour les FDS
Les États-Unis ne soutiennent pas complètement la ligne des FDS. C’est pourquoi ces derniers souhaitent l’implication de l’UE, de la France et désormais des pays du Golfe dans les négociations. Le projet des FDS repose sur la décentralisation et le refus du désarmement. Ils ont demandé que Mazloum Abdi obtienne un poste ministériel ou l’équivalent au sein d’un organe militaire d’État ; cela n’a pas été accordé. J’ai lu qu’un responsable des FDS, İlham Ahmed, a invité Türkiye à jouer un rôle de médiateur neutre dans les pourparlers avec Damas.
Tout cela signifie : la mer est aussi finie pour les FDS.
La pression temporelle sur eux s’intensifie.
C’est pourquoi l’appel du dirigeant du MHP, Bahçeli —
"qu’Imrali (d'où est incarcéré le leader du PKK/FDS) lance un nouvel appel aux FDS"
— est, en termes de calendrier, judicieux (la question de savoir si la Commission se rendra à Imrali est une autre affaire). Cet appel ouvre un espace pour que les FDS déposent les armes et s’intègrent à la Syrie en tant que citoyens égaux. Il faut saisir cette opportunité.
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