Depuis la réélection du président américain Trump et son entrée en fonction pour un second mandat, le commerce mondial a entamé une nouvelle phase. La pandémie de Covid-19, suivie de la guerre russo-ukrainienne, puis de l’occupation injuste et inhumaine de Gaza par Israël, ont considérablement ébranlé l’économie et le commerce mondial. Aujourd’hui, le monde semble régresser vers une période de stagnation économique semblable à celle provoquée par la pandémie. Les annonces faites par Trump le 2 avril 2025 concernant l’instauration de nouveaux droits de douane additionnels (DDA) sur plusieurs pays, dans le but d’équilibrer le budget des États-Unis et redresser leur économie, ont marqué le début d’une nouvelle ère dans le commerce mondial.
Dans un premier temps, cette mesure visait le Canada, le Mexique et la Chine, mais elle a fini par s’étendre à 182 pays. Les taux de DDA imposés à la Chine ont atteint jusqu’à 180 %. Toutefois, les négociations entre les États-Unis et la Chine ont permis une accalmie temporaire et un retour partiel à la normale. Bien que le problème ait été différé, il convient de préciser que les pourparlers sont toujours en cours pour parvenir à un accord définitif.
Affirmant que le déficit commercial bilatéral avec l’Union européenne ne cessait de croître, Trump a également annoncé des DDA à l’encontre de l’UE. Cependant, dans un objectif de compromis, il a repoussé cette décision au 1er août 2025. L’UE, au lieu d’ouvrir immédiatement des négociations avec les États-Unis, a envisagé la possibilité de prendre des contre-mesures. Avant d’entamer un processus de négociation mutuelle et d’accord, comme ce fut le cas entre les États-Unis et la Chine, l’UE a préparé, en concertation avec les États membres, une liste de contre-mesures tarifaires d’un montant total de 72 milliards d’euros. À ce jour, aucun processus de négociation sérieuse n’a été engagé entre l’UE et les États-Unis, hormis quelques échanges. Finalement, Trump a déclaré qu’il appliquerait des DDA de 30 % contre l’UE à partir du 1er août.
L’UE a donc mis en place une nouvelle stratégie de lutte contre les États-Unis, privilégiant la résolution par la négociation des différends commerciaux anciens, mais se préparant aussi à réagir par des mesures de rétorsion en cas d’échec des pourparlers. On peut résumer la stratégie de l’UE en trois étapes : d’abord, entamer des négociations équilibrées avec les États-Unis ; ensuite, appliquer des DDA sur certains produits (les 27 États membres ont quasiment finalisé une liste commune) ; enfin, rechercher des partenaires ayant un volume commercial significatif pour créer une alliance contre les États-Unis et mettre en œuvre des mesures efficaces conjointes. Ces trois principes constituent aujourd’hui la stratégie de réponse de l’UE face aux DDA américains.
L’Organisation mondiale du commerce (OMC), basée à Genève, n’a jamais été aussi importante et active dans son histoire. Face à l’impact négatif croissant de cette dynamique, les pays membres de l’OMC ont entamé un processus de coopération et de solidarité sérieux. L’UE est en tête de ce mouvement. Consciente des risques, elle ne cherche pas à affronter seule cette situation, mais tente de créer une plateforme commune en s’appuyant sur son expérience de la coopération multilatérale.
Naturellement, la Türkiye, bien qu’elle ne soit pas membre de l’UE, fait partie de l’Union douanière avec elle, et possède un volume commercial bien supérieur à celui de nombreux pays membres. Elle se retrouve ainsi en première ligne. Pour la première fois dans le cadre de l’Union douanière, le besoin de l’UE envers la Türkiye prend une nouvelle dimension. Avec un volume d’importation de 345 milliards de dollars et un commerce extérieur total avoisinant les 610 milliards de dollars, la Türkiye peut aujourd’hui jouer un rôle de soutien et de partenariat nouveau pour l’UE, au-delà de sa seule appartenance à l’Union douanière.
Les deux entités, l’UE comme les États-Unis, sont des partenaires commerciaux majeurs pour la Türkiye. En 2024, les États-Unis représentaient 6 % des exportations turques, juste derrière l’Allemagne, ce qui en fait le deuxième marché d’exportation. Pour les importations, les États-Unis étaient le cinquième fournisseur, avec une part de 4,7 %. En valeur, les exportations turques vers les États-Unis ont augmenté de 10 % pour atteindre 18 milliards de dollars, tandis que les importations ont progressé de 2 % pour atteindre 7,4 milliards de dollars. L’objectif à long terme est de porter le volume commercial bilatéral au-delà de 100 milliards de dollars. Le commerce avec l’UE est quant à lui bien plus conséquent, avec l’UE en première position aussi bien pour les exportations que pour les importations.
À la lumière de ces données, il apparaît que la Türkiye peut, comme dans d’autres conflits régionaux, jouer un rôle d’intermédiaire et de modérateur dans la question des DDA entre les États-Unis et l’UE, et contribuer à relancer le commerce mondial. Cela nécessite toutefois un travail rigoureux, le développement d’alternatives et de partenariats, ainsi qu’une diplomatie active au sein de l’OMC. Le Président de la République, grâce à sa fiabilité et son équilibre dans ses médiations, jouit d’une grande considération de la part tant des États-Unis que de l’UE, dans laquelle nous sommes intégrés via l’Union douanière. Mais cette démarche doit impérativement s’accompagner d’un travail technique approfondi.
Un travail sérieux pourrait renforcer la crédibilité de la Türkiye auprès de l’UE comme des États-Unis, et jouer un rôle clé dans ce processus. L’UE est en quête d’un partenaire fiable. Les États-Unis ont besoin d’un soutien pour contrebalancer la pression croissante qu’ils exercent eux-mêmes via les DDA. Sur le plan géographique, culturel et commercial, le partenaire et allié le plus approprié pour l’UE semble être la Türkiye, intégrée à l’Union douanière. Ce processus pourrait même ouvrir de nouvelles perspectives de coopération et rendre l’accord d’Union douanière plus productif pour les deux parties. Il reste à suivre ce processus avec attention, à mener un travail technique rigoureux, et à rapprocher ces deux grands partenaires commerciaux autour d’une plateforme commune en vue d’un compromis.
D’ailleurs, le lundi 14 juillet, Maros Sefcovič, commissaire européen chargé du commerce et chef des négociations pour les 27 États membres, a déclaré, à l’issue de la réunion des ministres du commerce à Bruxelles, que l’application des DDA par les États-Unis pourrait "mettre fin à l’ensemble du commerce transatlantique et provoquer la remise en cause et la désorganisation des chaînes d’approvisionnement". Il a ainsi insisté sur l’importance d’éviter un tel scénario négatif et de privilégier les négociations. Toutefois, bien que les préparatifs pour une éventuelle riposte soient presque terminés, les informations relayées montrent que les ministres du Commerce des pays membres ne sont pas tous unanimes sur cette riposte. La majorité semble favorable à l’obtention d’un accord mutuel.
En combinant l’expertise commerciale et technique de notre pays avec la coordination entre notre Président de la République, notre ministre des Affaires étrangères et le ministère du Commerce, il est possible de faciliter ce processus au bénéfice des trois parties : les États-Unis, l’UE et la Türkiye.
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