Près 350 acteurs du monde rural venus de l’Afrique de l’Ouest et du Centre et de l’Europe se sont retrouvés à Zoungbonou une localité dans le sud du Bénin à environ 90 kilomètres de Cotonou pour une foire de semences paysannes.
La rencontre tenue du 09 au 11 mars 2023 a surtout servi d’occasion pour lancer une campagne internationale pour la défense des systèmes semenciers paysans.
Sous un hangar où elle tient son stand, Thérèse Pulchérie Méthé, une foraine camerounaise expose des semences qu’elle a amenées.
Il y a des grains de maïs rouge, des arachides blanches ou encore des pistaches. D’après l’agricultrice, ces semences qui étaient en voie de disparition ont survécu grâce au travail abattu par le Réseau des acteurs du Développement Durable (Rad), une organisation qui s’active dans l’agro écologie au Cameroun.
Comme cette exposante camerounaise, tous les participants à la foire des semences paysannes de Zoungbonou sont unanimes que les semences paysannes sont fortement menacées de disparition.
Le juriste nigérien Ibrahim Diori qui est un activiste sur les droits des paysans africains a signalé que les Etats de l’Afrique de l’Ouest sont en train de tendre progressivement vers des législations qui favorisent les Ogm.
Pour lui, les règlements communautaires de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uémoa) et la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) sur la certification des semences visent uniquement à créer un espace commerciale pour favoriser les multinationales au détriment des paysans.
Les semences paysannes, la seule option pour garantir la sécurité alimentaire en Afrique
La foire paysanne de Zoungbonou au Bénin s’est tenue autour du thème "Droits des Paysans et des peuples face à la montée en puissance des organismes génétiquement modifiés dans l’alimentaire et dans l’agriculture en Afrique".
Parmi les participants, Mariama Sonko fait figure pionnière. Cette sénégalaise présidente de ‘’Nous Sommes la Solution’’, une association qui rassemble des femmes paysannes venant de huit pays d’Afrique de l’Ouest a participé à toutes les dix éditions. Elle estime que toutes les maladies qui envahissent le continent africain sont la conséquence de la mauvaise alimentation.
Les forains sont convaincus que seules les semences paysannes sont en mesures d’assurer la sécurité alimentaire sur le continent. C’est la leçon que retient Omer Agoligan de la guerre en Ukraine. Installé à Djougou le nord du Bénin, il est membre de l’Organisation des ruraux pour une agriculture durable (Orad).
Il appelle les dirigeants africains à tirer des leçons de ces situations et se miser sur les paysans s’ils veulent vraiment aller à la souveraineté alimentaire.
Mamadou Goïta agro-écologiste malien et un membre d’honneur de l’Alliance africaine pour la souveraineté alimentaire (Asfa en anglais) donne en exemple le cas de la pandémie du Covid 19.
Une campagne africaine pour la défense des systèmes semenciers paysans
Pendant les trois jours de la foire, les acteurs du monde rural ont surtout débattu des actions à mener pour redorer le blason des semences paysannes. Les tenants de la ligne dure comme le juriste Ibrahim Diori qui appellent les paysans à se mobiliser pour un rapport en leur faveur. Il soutient que c’est l’unique option pour obliger les gouvernants à redonner aux semences paysannes, la place qui leur revient dans les politiques agricoles.
La présidente de l’association ‘’Nous sommes la solution’’ estime de son côté qu’il faut expliquer les enjeux aux dirigeants et les convaincre de la nécessité de préserver les semences paysannes. Mariama Sonko indique aussi qu’il faut maintenant passer à l’action pour changer les idées que beaucoup se font des semences paysannes.
Elle invite les chercheurs des universités à s’intéresser aux semences locales comme ils le font avec les semences améliorées.
Les participants ont tous salué la tenue des foires qui leur permettent d’échanger des semences afin d’assurer leur pérennité. Les forains ont aussi été encouragés à créer des ‘’case de semences’’ dans le monde paysan pour constituer d’importantes réserves de semences paysannes.
A la clôture de cette troisième édition tournante de la foire des semences paysannes, l’Alliance africaine pour la souveraineté alimentaire a lancé une Campagne pour la défense des systèmes semenciers paysans sur le continent. Sur plusieurs années, l’association va entreprendre des actions dans plusieurs pays pour sensibiliser sur la nécessité pour l’Afrique de préserver et promouvoir son capital semencier paysan.
Cette foire des semences paysannes organisée par le Comité Ouest-Africains des semences paysannes (Coasp) a aussi vu la participation d’un représentant de l’Ong française ‘’Alternatives agro-écologiques et solidaires (Sol).