Référendum au Venezuela pour renforcer ses prétentions sur une région du Guyana

12:503/12/2023, dimanche
AFP
Le président vénézuélien Nicolas Maduro s'exprimant lors de la campagne de clôture du référendum sur la défense du territoire de l'Essequibo à Caracas, le 1er décembre 2023.
Crédit Photo : Pedro Rances Mattey / AFP
Le président vénézuélien Nicolas Maduro s'exprimant lors de la campagne de clôture du référendum sur la défense du territoire de l'Essequibo à Caracas, le 1er décembre 2023.

"L'Essequibo est à nous", proclame le slogan officiel placardé partout dans les rues: quelque 21 des 30 millions de Vénézuéliens sont appelés aux urnes dimanche pour un référendum sur ce territoire riche en pétrole que Caracas réclame au Guyana.

"C'est à nous de hisser le drapeau de l'Essequibo et d'entamer une nouvelle étape pour la récupération historique de cette terre léguée par les libérateurs"
(à l'époque de Simon Bolivar), a déclaré le président Nicolas Maduro lors de la clôture de la campagne devant des milliers de personnes vendredi à Caracas.


Le référendum qui n'est pas un scrutin d'autodétermination, l'Essequibo étant sous administration du Guyana n'aura pas de conséquences concrètes à court terme. Caracas cherche avec le plébiscite attendu à renforcer sa crédibilité et ses prétentions. Les autorités ont souligné qu'elles ne cherchaient pas un motif pour envahir la zone, comme le craignent les Guyaniens.


Après des appels d'offres pétroliers guyaniens et une nouvelle découverte d'or noir en octobre, la tension est montée ces derniers mois avec des déclarations musclées, des exercices militaires, l'évocation d'installation de bases américaines... Le Brésil, qui a renforcé ses troupes à la frontière, s'est dit
"préoccupé"
par le
"climat de tension".

Le Venezuela revendique depuis des décennies ce territoire (parfois appelé Guayana Esequiba) de 160.000 km2 représentant plus des deux tiers du Guyana et où vivent 125.000 personnes, soit un cinquième de sa population.

Caracas soutient que le fleuve Essequibo devrait être la frontière naturelle, comme en 1777 à l'époque de l'empire espagnol, et estime que le Royaume-Uni s'est octroyé des terres vénézuéliennes au XIXe siècle. 


Le Guyana, qui dispose désormais de réserves de pétrole similaires à celle du Koweït et se place en haut de la liste de réserves per capita dans le monde, estime que la frontière date de l'époque coloniale anglaise et que celle-ci a été entérinée en 1899 par une Cour d'arbitrage. Le pays a saisi la Cour internationale de justice (CIJ), plus haute instance judiciaire de l'ONU, pour la faire valider.


Georgetown a aussi saisi la CIJ pour tenter de faire stopper le référendum en estimant qu'il s'agissait d'une incitation à
"la violation des droits internationaux".

"5 fois oui"


En vain. Dans une décision vendredi, la CIJ a enjoint à Caracas de
"s'abstenir d'entreprendre toute action qui modifierait la situation dans le territoire en litige",
sans mentionner le référendum.

Caracas avait de toute façon déjà annoncé qu'il ne renoncerait pas à son organisation quelle que soit la décision.


"Nous pensons que la justice, et non la force, devrait être l'arbitre des différends internationaux",
a déclaré vendredi le président guyanien Irfaan Ali, actuellement à la COP28 aux Emirats arabes unis, où il a rencontré le ministre des Affaires étrangères britannique David Cameron.

Le référendum en cinq questions demande notamment aux Vénézuéliens s'ils sont d'accord pour ne pas reconnaître la compétence de la CIJ, de refuser l'accord de 1899 qui leur aurait été
"imposé de manière frauduleuse"
et pour intégrer le territoire au Venezuela.

"5 fois oui",
ont martelé les autorités vénézuéliennes lors d'une campagne omniprésente dans les médias et qui a mobilisé d'importants moyens avec des manifestations, des publicités, des conférences, des parades militaires...

L'opposition à M. Maduro, qui dans son ensemble revendique l'Essequibo, s'est montrée réservée sur le sujet, tiraillée entre ses convictions et l'obligation de soutenir le pouvoir à moins d'un an de la présidentielle de 2024.


La principale opposante Maria Corina Machado a estimé que le référendum était une
"distraction"
dans le contexte de crise politique et économique mais aussi une
"erreur qui ne défend pas notre territoire".

Dans la rue, de nombreux Vénézuéliens se disent motivés:
"Nous avons un engagement envers le pays",
lance Marlis Palmes, femme au foyer à Caracas.
"Ceux qui sont d'accord, je les félicite; ceux qui ne le sont pas, l'histoire les jugera".

Les résultats sont attendus en soirée.


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