Les bureaux de la BBC à New Delhi et Bombay ont été perquisitionnés cette semaine durant trois jours par le fisc indien, moins d'un mois après la diffusion par la chaîne britannique d'un documentaire sur le Premier ministre Narendra Modi.
Depuis 2021, au moins quatre médias indiens, critiques du gouvernement, ont été perquisitionnés par des agents du fisc ou de la brigade d'investigations financières, affirme M. Majumdar.
Tous ces médias ainsi que la BBC ont déclaré que les téléphones avaient été confisqués et les ordinateurs des journalistes ouverts, poursuit-il.
"Intimidation"
La BBC venait de diffuser, en janvier, un documentaire en deux parties consacré à l'ascension politique de M. Modi et à son rôle dans les sanglantes émeutes interconfessionnelles de 2002 dans l'Etat du Gujarat (ouest) qu'il dirigeait à l'époque.
Recourant aux mesures exceptionnelles d'urgence prévues par les lois sur les technologies de l'information, les autorités ont bloqué des vidéos et des tweets liés directement au documentaire qui n'a pas pu être diffusé en Inde.
Les groupes de défense des droits accusent M. Modi et le BJP de chercher à museler les critiques et s'inquiètent de l'érosion de la liberté de la presse.
Le documentaire de la BBC contient notamment l'extrait d'un entretien de M. Modi, peu après les émeutes au Gujarat, avec un journaliste qui lui demande si son administration aurait pu faire davantage pour faire cesser les violences.
Au moins 1.000 personnes avaient été tuées, la plupart musulmanes.
"Attaques misogynes"
Depuis l'arrivée de M. Modi au pouvoir en 2014, l'Inde a reculé de dix places au classement mondial sur la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières (RSF), passant au 150e rang (sur 180) en 2022.
La journaliste Rana Ayyub est constamment harcelée par les zélateurs du BJP depuis son enquête sur l'implication présumée de responsables gouvernementaux dans les émeutes au Gujarat et dont elle a tiré un livre.
La chroniqueuse du Washington Post a été victime d'une violente campagne en ligne, usant notamment de tweets visant à salir sa réputation et sa crédibilité.
Détention sans procès
Les journalistes sont depuis longtemps confrontés au harcèlement, aux menaces et à l'intimidation pour leur travail en Inde, mais ils subissent plus que jamais des poursuites pénales, s'inquiète l'organisation Free Speech Collective.
Et une fois arrêté, un journaliste peut passer des mois, voire des années, à attendre que son cas soit examiné par la justice.
Selon RSF, au premier janvier 2023, dix journalistes étaient incarcérés en Inde dont Siddique Kappan, détenu plus de deux ans sans procès et libéré sous caution début février.
Il s'était rendu dans le nord de l'Inde pour un reportage sur une retentissante affaire de viol collectif. Il a été accusé d'appartenir à un groupe islamiste et inculpé pour incitation à la haine religieuse.