C'est un procès qui se veut historique, qui s'est ouvert ce lundi à Paris, devant la Cour d'Assises spécialement composée et qui doit durer jusqu'au 20 décembre selon le calendrier prévisionnel transmis par le Parquet National Antiterroriste (PNAT).
Et pour cause, quatre ans après les faits, la justice aura à déterminer les responsabilités des huit accusés, dans l'assassinat, le 16 octobre 2020, de Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie au collège du Bois d'Aulne à Conflans-Sainte-Honorine, décapité à la sortie des cours par un ressortissant russe, d'origine tchétchène, âgé de 18 ans.
Son bourreau, Abdoullakh Anzorov, abattu dans la foulée par les forces de l'ordre, reprochait à l'enseignant d'avoir montré à ses élèves, des caricatures issues du journal satirique Charlie Hebdo et mettant en scène le prophète Mohammed.
L'attentat avait provoqué une onde de choc dans tout le pays, et le nom de Samuel Paty fait depuis office de symbole. Six mineurs ont déjà été condamné par le tribunal pour enfants, au terme d'un procès intervenu fin 2023.
Parmi les accusés figurent deux des proches d'Abdoullakh Anzorov, Azim Epsirkhanov et Nabil Boudaoud, qui devront répondre de faits qualifiés de complicité d'assassinat terroriste et encourent une peine de prison à perpétuité. Tous deux âgés respectivement de 23 et 22 ans, sont soupçonnés d'avoir accompagné le tueur de Samuel Paty dans l'achat d'armes. Nabil Boudaoud l'aurait par ailleurs déposé sur les lieux de l'attentat.
Brahim Chnina et Abdelhakim Sefrioui, âgés de 52 et 65 ans, et tous deux également détenus depuis les faits, auront à répondre à des accusations d'association de malfaiteurs terroriste.
Leurs vidéos génèrent de très nombreux commentaires, et le nom de l'enseignant ainsi que celui de son établissement sont finalement divulgués, permettant à Abdoullakh Anzorov de l'identifier, le localiser, avant de se rendre sur les lieux pour le décapiter.
Le premier a notamment diffusé le message de revendication de l'attentat ainsi que la photo de Samuel Paty décapité, le second est accusé d'avoir conforté son procès d'assassinat et d'avoir publié des messages de satisfaction après l'annonce de la décapitation de Samuel Paty.
Le troisième, également âgé de 22 ans, comparaît libre mais sous contrôle judiciaire pour avoir participé aux groupes Snapchat et évoquait un éventuel départ vers des zones de guerre pour y rejoindre une organisation terroriste.
Du 4 novembre au 20 décembre (sous réserve de modifications ultérieures), la justice antiterroriste aura donc la lourde tâche d'établir le rôle de chacun dans l'engrenage infernal qui a conduit à la mort de l'enseignant.
Au total, 98 témoins sont cités à comparaître, dont 53 par le PNAT et 18 experts, tandis que 24 parties civiles ont été enregistrées.
La Cour est de son côté composée d'un magistrat et quatre assesseurs (un cinquième assesseur sera présent), alors que le ministre public sera représenté par deux avocats généraux, affiliés au PNAT.
S'agissant du déroulé des débats, la première semaine sera consacrée aux appels de témoins et d'experts, aux auditions des enquêteurs de personnalité ou encore à la présentation générale de l'enquête et à l'audition des médecins légistes et parties civiles.
Les deuxième et troisième semaines seront axées sur les faits reprochés à Nabil Boudaoud et Azim Epsirkhanov ainsi qu'à leurs interrogatoires.
La quatrième semaine se focalisera sur les cas d'Abdelhakim Sefrioui et Brahim Chnina tandis que leurs interrogatoires se prolongera sur le début de la cinquième semaine. Celle-ci (ainsi que la sixième semaine) se poursuivra ensuite par l'étude des faits reprochés aux quatre autres accusés.
Enfin, la dernière semaine de ce procès historique sera consacrée aux réquisitions et aux plaidoiries de la défense avant que la parole ne soit donnée aux accusés, le 19 décembre. Le délibéré devrait, en l'absence de modifications, être dévoilé le 20 décembre.
Malgré ces divers détails qui, mis bout à bout, laissent à penser que la gestion du cas de Samuel Paty n'a pas été à la hauteur, Mickaëlle Paty confirme n'avoir reçu aucune réponse de la part de l'Etat et notamment du ministère de l'Éducation nationale après sa demande de reconnaissance de responsabilité.